« La poésie sauvera le monde », ose le poète Jean-Pierre Siméon en
titrant ainsi son dernier essai manifeste (réédité au Passeur). Il
suffit de lire Éluard,
Liberté, j'écris ton nom, pour se souvenir
de son importance au XXe siècle. Et c'est ce poème que le Centre
Pompidou a affiché sur ses murs après les attentats de
Paris
du 13 novembre. Ce lien évident entre le besoin de poésie et la
violence du monde, la programmation de la 18e édition du Printemps des
poètes, que son directeur, le même Siméon, a placée sous le signe du
« Grand vingtième », le rend visible et vivant partout en
France. En voici quelques repères à retrouver
sur le site.
Soutien au poète palestinien Ashraf Fayad
Cette édition est dédiée au
poète Ashraf Fayad condamné par l'
Arabie saoudite,
où ce natif de Gaza réside, à 8 ans de prison et 800 coups de fouet
pour ses propos et ses écrits poétiques considérés comme « athées ». Une
traduction de ses poèmes vient de paraître aux éditions le Temps des
cerises, présentés et traduit de l'arabe par le grand poète Abdellatif
Laâbi.
La galaxie poétique du XXe siècle
Dès ce week-end, la poésie déambule sous toutes ses formes, s'affiche
plus que jamais dans le métro parisien où, de longue date, la RATP –
qui remet son
grand prix de poésie le 14
– a entamé un compagnonnage avec les poètes pour le plus grand bonheur
de ses voyageurs. Elle court sur les ondes de France Culture pour un
week-end intensément poétique, balisant le XXe siècle. Celui-ci
s'explore sur la Toile comme
une constellation, remarquable voyage multimédia de Ponge à Char, de Ginsberg à Cendrars.
Poésie Gallimard a 50 ans
Grâce à un catalogue de plus de 500 titres, Poésie Gallimard glisse
la poésie du monde entier et de tous les temps dans la poche des
lecteurs, et s'enrichit de dix poètes contemporains, de Vénus Khoury
Gata à Alain Duault : ceux qui se souviennent du passeur de musique
classique ont tout intérêt à découvrir son univers de poète. Il faudrait
en citer tant d'autres, de l'Oulipo (Ouvroir de littérature
potentielle) à Oscar Milosz, de François Cheng jusqu'à Michel
Houellebecq, dans cette part moins visible de son oeuvre.
Pléaide d'éditeurs
Combien sont-ils, toute l'année, à défendre ce genre ?
La Poéthèque,
site ressource, donne une idée de la variété des éditeurs qui publient
de la poésie et particulièrement en ce printemps. Les éditions Bruno
Doucey y consacrent tout leur catalogue, La Différence n'a jamais cessé
d'en publier, mais encore Le Cheyne éditeur, Rougerie, Dumerchez,
Obsidianne, dès l'enfance les éditions Rue du Monde parmi d'autres
offrent leurs premiers poèmes aux lecteurs qui le sont naturellement...
On le sait peut-être moins, mais des maisons généralistes comme POL, qui
accompagne Bernard Noël, ou le Mercure de France qui édite Adonis (et
son tout nouveau recueil
Jérusalem), en attendant le mois de mai
qui verra la parution du nouveau recueil d'Yves Bonnefoy, ou encore
Flammarion, ne lâchent pas leur département poésie. Le romancier
Frédéric Brun (auteur de
Perla) a décidé de tout miser sur elle en créant sa maison d'édition
Poésis, qui vient de publier une anthologie invitant, avec Holderlin, à « habiter poétiquement le monde ». La formule vient du poème
En bleu adorable.
« L'état de poésie, le seul, selon le poète haïtien René Depestre, qui
permet de marcher pieds nus sur des kilomètres de braise et de
tessons », n'est pas réservé à un petit monde de nostalgiques. La poésie
se porte beaucoup mieux dans bien des coins du monde, ne serait-ce
justement qu'en Haïti, il n'y a qu'à ouvrir l
'Anthologie de poésie haïtienne que publie Points, à l'honneur sur la scène de la Maison de la poésie le 18 mars, pour en savoir quelque chose.
Poésie sur scènes
Le New morning ouvre
ses portes le 6 mars aux poètes, en relation avec le festival Voix
vives de Sète l'un des grands rendez-vous en province, où, bien des
poètes en témoignent, les salles sont remplies lorsqu'ils s'y
présentent. Le 8 mars au soir, la Comédie-Française honore les cinquante
bougies de Poésie Gallimard avec un plateau de rois. Toute l'année,
dans la capitale, la poésie revit dans un havre qui fait le choix de la
mêler à d'autres genres et d'en multiplier, par la musique, les
performances, la vidéo, les formes :
la Maison de la poésie-Scène littéraire
ouvre le bal dans « l'ivresse poétique » le 5 mars et poursuit une
programmation qui va du Belge Jean-Pierre Verreghen à la poétesse
syrienne Maram Al-Maasri. Et dans cette salle qui ne désemplit pas, le
public venu entendre l'écrivain Ta–Nehisi Coates, au moment où ce
dernier lut en anglais le poème de Robert Hayden
The Middle Passage, fut habité, on en témoigne, par un silence de pure poésie.
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