jeudi 28 mai 2015

Les Arvernes, le gaulois puis le latin…

LA MONTAGNE  Auvergne  28/05/15 

La rubrique du médiateur : Les Arvernes, le gaulois puis le latin…

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 - Dessin Deligne
- Dessin Deligne
Le collège a fait polémique pour une réforme expédiée. Le débat, sous un « vernis de culture » sur les langues
anciennes, a passionné certains de nos lecteurs. C’est que sur leur terre, ils savent ce que parler gaulois veut dire?!
Alea jacta est (le sort en est jeté)?! De quoi parlons-nous?? De la réforme du collège. Qui n’a finalement pas terrassé le latin (et le grec). Ni l’allemand – mais nos lecteurs en font l’impasse. Les Arvernes (Arveni) ayant légué leurs langues et leur nom à l’ Auvergne, on a l’impression qu’ici les initiés aux mystères de la langue de Cicéron cultivent toujours la locution avec plaisir.
Verba volant, scripta manent (les paroles s’envolent, les écrits restent)?! Justement, « il faut savoir si on perd son latin entre ce qu’il faut savoir, ce qui est obligatoire et ce qui est facultatif. » La question de Marie est pleine de bon sens. Tutti quanti (et tous les autres) « ne comprennent pas qu’on ait l’idée de sacrifier le latin sur l’autel de la méconnaissance » s’émeut Madeleine. Vade retro, satanas?! (retire-toi, Satan) : elle nous a écrit avant que la réforme du collège soit votée. Aujourd’hui, comme l’avance la ministre de l’Éducation Najat Vallaud-Belkacem, « les langues anciennes sont désormais l’un des choix offerts dans les enseignements pratiques disciplinaires obligatoires à tous les élèves ».
Si ce n’est pas de la langue de bois, c’est que, Errare humanum est (l’erreur est humaine), certifie Roger, qui voit « dans cette copie à améliorer, le contraire de la formule Dura lex, sed lex (la loi est dure, mais c’est la loi). »
Donc, Si vis pacem, para bellum (si tu veux la paix, prépare-toi à la guerre) est l’étendard brandi par Michèle, lectrice de Paris, qui, enfant a découvert l’Auvergne, « en apprenant le latin à partir du texte latin authentique de Jules César sur ses commentaires sur la Guerre des Gaules (VII, 9), et surtout sur les préparatifs de l’épique bataille menée par Vercingétorix devant Gergovie. »
Ah?! Ces Arvernes qui maniaient une langue celtique avant de parler gaulois (qui ne s’écrivait pas contrairement au latin) puis la langue de César. Car « les ancêtres des Auvergnats ont adopté ce latin, obligatoire pour ceux qui avaient choisi de servir dans l’armée romaine », confirme Pierre, « ancien prof de latin-grec ».
Veni, vidi, vici (je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu). Comme quoi, en fait, tout le monde parle latin sans le savoir. Mens sana incorpore sano (un esprit sain dans un corps sain). N’est-ce pas??
Michel Fillière
michel.fillière@centrefrance.com
Déclinaison
Le latin, langue administrative, a supplanté le gaulois, langue indo-européenne (comme le latin). Une disparition résultant du choc de deux cultures :
l’orale avalée par la littéraire. Francisés, de nombreux mots des Gaulois ont traversé les siècles. Comme berceau, cloche, cheval, etc. On ignore souvent leur parcours, mais ils sont de purs dérivés du gaulois dont on pense qu’il faisait surtout des miracles en sorcellerie dans des incantations clandestines du druidisme. Alors, le latin, définitivement « langue morte »?? Sauf qu’il est vraiment utile
à l’archéologie, à la médecine, à la religion… Mais, le latin est-il vital?? L’histoire fait des histoires. Décliner rosa, rosa, rosam n’est plus la panacée des élèves de 2015 : ils sont seulement 18 % à croire en cette langue. Seul le Vatican s’en accommode : il concentre le maximum de locuteurs au monde?!
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mardi 19 mai 2015

Jean Zay, une oeuvre colossale, un héritage

La Montagne  12/05/15

Education, culture... Jean Zay, une oeuvre colossale, un héritage


Archives. - Philippe CROS
Archives. - Philippe CROS
Jean Zay, ancien ministre de l’Éducation et des Beaux Arts, a laissé une œuvre considérable entre 1936 et 1939.
Le Républicain exemplaire. Jean Zay était un politique « d’une grande probité, et c’est aussi pour cela qu’il a été autant détesté », estime Pierre-Louis Emery, président du Cercle Jean-Zay. Résistant à Hitler, il a été l’incarnation de la République par sa vie et son éducation. Il est mort « en raison de la détestation du Front populaire mêlée d’antisémitisme politique et de conservatisme », ajoute Antoine Prost, président des Amis de Jean Zay. En prison, il réfléchissait à une République restaurée et plus forte. C’était un pur laïc. Il a empêché par circulaire la propagande religieuse à l’intérieur des établissements scolaires. « La volonté d’une plus grande démocratie, le respect des individus sont toujours valables », assure Antoine Prost.
Le réformateur. « J’ai eu tort d’avoir raison trop tôt », écrivait le ministre. Ses idées se sont concrétisées : le Festival de Cannes, l’école nationale de l’administration (il s’était interrogé sur la passivité des hauts fonctionnaires en juin 40), le Centre national de la recherche scientifique, le musée d’Art moderne, celui des Arts et Traditions populaires, la réunion des théâtres nationaux, la protection de la propriété intellectuelle, les bibliobus... « Il avait le souci d’une large culture humaniste pour tous », précise Antoine Prost.
L’éducateur. Jean Zay a démocratisé l’école, âme de la République, en prolongeant à 14 ans l’obligation scolaire, en créant la classe de fin d’études primaires, en rapprochant l’enseignement primaire supérieur (celui des bons élèves du peuple) de l’enseignement secondaire (réservé à une minorité très favorisée). Il a mis en réseau les centres d’orientation, créé les classes promenade, développé le sport scolaire et universitaire. « Comme il attendait le résultat des expériences lancées avant de promulguer de nouveaux règlements, il a mis en mouvement l’Éducation nationale. » La méthode expérimentale, l’appel aux initiatives locales sont toujours d’actualité, mais le ministère de l’Éducation nationale « n’était pas comme aujourd’hui une énorme machine »...
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samedi 9 mai 2015

Jean d'Ormesson : lettre ouverte au président de la République et aux « Attila » de l'éducation

Jean d'Ormesson : lettre ouverte au président de la République et aux « Attila » de l'éducation

FIGAROVOX/EXTRAIT - Jean d'Ormesson écrit au président de la République au sujet de la réforme du collège. Il lui demande de ne pas laisser dépérir nos biens les plus précieux : notre langue, notre littérature, notre culture.(extrait)

Monsieur le Président de la République,
Plus d'une fois, vous avez souligné l'importance que vous attachiez aux problèmes de la jeunesse, de l'éducation et de la culture. Voilà que votre ministre de l'Éducation nationale se propose de faire adopter une réforme des programmes scolaires qui entraînerait, à plus ou moins brève échéance, un affaiblissement dramatique de l'enseignement du latin et du grec et, par-dessus le marché,de l'allemand.
Cette réforme, la ministre la défend avec sa grâce et son sourire habituels et avec une sûreté d'elle et une hauteur mutine dignes d'une meilleure cause. Peut-être vous souvenez-vous, Monsieur le Président, de Jennifer Jones dans La Folle Ingénue? En hommage sans doute au cher et grand Lubitsch, Mme Najat Vallaud-Belkacem semble aspirer à jouer le rôle d'une Dédaigneuse Ingénue. C'est que son projet suscite déjà, et à droite et à gauche, une opposition farouche.
On peut comprendre cette levée de boucliers. Il y a encore quelques années, l'exception culturelle française était sur toutes les lèvres. Cette exception culturelle plongeait ses racines dans le latin et le grec. Non seulement notre littérature entière sort d'Homère et de Sophocle, de Virgile et d'Horace, mais la langue dont nous nous servons pour parler de la science, de la technique, de la médecine perdrait tout son sens et deviendrait opaque sans une référence constante aux racines grecques et latines. Le français occupe déjà aujourd'hui dans le monde une place plus restreinte qu'hier. Couper notre langue de ses racines grecques et latines serait la condamner de propos délibéré à une mort programmée.
Mettre en vigueur le projet de réforme de Mme Najat Vallaud-Belkacem, ce serait menacer toute la partie peut-être la plus brillante de notre littérature. Montaigne et Rabelais deviendraient vite illisibles. Corneille, Racine, La Fontaine, Bossuet changeraient aussitôt de statut et seraient difficiles à comprendre. Ronsard, Du Bellay, Chateaubriand, Giroudouxou Anouilh - sans même parler de James Joyce- tomberaient dans une trappe si nous n'apprenions plus dès l'enfance les aventures d'Ulysse aux mille ruses, si nous ignorions, par malheur, qu'Andromaque est la femme d'Hector, l'adversaire malheureux d'Achille dans la guerre de Troie,si nous nous écartions de cette Rome et de cette Grèce à qui, vous le savez bien, nous devons presque tout.
Les Anglais tiennent à Shakespeare, les Allemands tiennent à Goethe,les Espagnols à Cervantès, les Portugais à Camoens, les Italiens à Danteet les Russes à Tolstoï. Nous sommesles enfants d'Homère et de Virgile- et nous nous détournerions d'eux! Les angoisses de Cassandre ou d'Iphigénie, les malheurs de Priam, le rire en larmes d'Andromaque, les aventures de Thésée entre Phèdre et Ariane, la passion de Didon pour Énée font partie de notre héritage au même titre que le vase de Soissons, que la poule au pot d'Henri IV, que les discours de Robespierreou de Danton, que Pasteurou que Clemenceau.


La suite dans le Figaro du 9 mai 2015
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