vendredi 16 octobre 2015

Quand les lycéens désavouent les inspecteurs pédagogiques

Bac erre Illustration tirée de l'excellent blog "Une année au lycée", avec l'aimable autorisation de Fabrice ERRE

Un billet précédent a mis en lumière les dérives des inspecteurs pédagogiques régionaux obsédés par les taux de réussite au bac. Plusieurs témoignages écrits et oraux sont venus élargir l'arsenal des astuces (souvent grosses), et contorsions auxquelles ils recourent pour atteindre leur objectif. Ils semblent avoir renoncé aux barèmes supérieurs à 20, trop grosse ficelle. En revanche,  barèmes triturés pour octroyer les points aux questions les plus faciles, consignes de notes [ "on ne met pas moins de 6"... à une production  ressemblant très vaguement à ce qu'on attend], pressions diverses sur les correcteurs, parfois  sommés de faire leur autocritique devant d'autres collègues restent très efficaces.
Le plus amusant, c'est que bien souvent, les élèves sont très sévères avec ces inspecteurs, quand ils connaissent leurs pratiques. Petite expérience édifiante:
En cours d'année, alors qu'ils sont habitués à composer sur des exercices de type bac, ou carrément sur un sujet entier, on les évalue avec une grille de notation du bac. Les élèves sont décontenancés non pas, par la faiblesse de leurs notes, mais par le fait qu'elles s'envolent.  Les élèves de ES ont entendu parler de l'inflation des diplômes (R Boudon) ou encore de l'inflation scolaire (M Duru bellat). Deux sociologues de sensibilités différentes qui s'inquiètent de la course aux diplômes dévalués. Les élèves demandent mais pourquoi des gens intelligents encouragent des pratiques qui les font aller droit dans le mur. On se retient pour éviter une réponse spontanée, trop péremptoire du type : incompétence, lâcheté, carrièrisme. L'incrédulité des élèves est touchante, il faut quand même les rassurer.
Les profs ne sont pas là pour désespérer les élèves. On se force un peu au début, pour les convaincre qu'ils ne sont pas assignés à ne recevoir qu'un assignat, en guise de diplôme. On explique qu'il faut être plus exigeant en cours d'année, et ainsi on a une marge de sécurité le jour du bac. Surtout, on fait comprendre que le supérieur les attend, pour certains des concours difficiles et qu'on ne peut se satisfaire des dérives cautionnées sans nuance par l'inspection. Et le prof parce qu'il aime son métier est convaincu qu'il faut aider les élèves et ne pas les laisser trop gamberger, les stimuler sans les décourager.
Au terme de ces deux billets, la critique des inspecteurs (côté lycéens, côté enseignants) me paraît mesurée.  Qu’ils nous aident à voir plus loin que notre guidon quotidien: oui. Qu’ils soient aussi les gendarmes évitant les dérapages: oui. Le problème, c’est quand ils veulent nous faire prendre des vessies pour des lanternes. On ne tient plus compte du hors sujet, de la paraphrase, de la non utilisation des documents (démarche basique des SES). Là, ils ne nous éclairent plus, ils nous chauffent, ils nous échauffent.


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