LE
PRINTEMPS DES POETES Vendredi
25 mars 2016
ADRIENNE
Morte sans
le savoir
J'ai
vu mes yeux se fermer sur le vain espoir d'un autre soleil et je me
suis enfuie sous la mer avec les vagues qui descendent là où
tournoient d'étranges nageoires ponctuant le purgatoire.
J'ai
regardé mes jambes plier sous le boutoir acéré de la peur et je me
suis enfuie dans des songes opalins où fusent les couleurs d'un
arc-en-ciel éternel trouant le morbide désespoir.
J'ai
senti mon cœur tomber dans un trou noir et je me suis enfuie dans
des limbes constellés d'argent fondu où palpite l'oiseau revêtu de
flammes érubescentes jouant avec le destin sur son perchoir.
J’ai
entendu mes cris crever les tympans cossards
des Titans et je me suis enfuie au sein de la terre noire
là où règnent les spectres
d’étranges démons chevauchant des idées blasphématoires.
Et
je suis tombée dans un dépotoir le soir au détour d’un trottoir.
Adrienne
03/2016
Evasion
Luc
risqua un oeil par-dessus son épaule. L’homme aux contours à la
fois
flous et secs était toujours là. A l’autre extrémité du
couloir. Il
sentait
son regard fiché entre ses deux omoplates. Pourtant, Luc avait
pris
son temps pour parcourir ce long corridor, dans le vague espoir
que
l’individu ait disparu, comme broyé par les intestins de pierre de
la
vieille
demeure. Cela faisait maintenant deux journées entières que cet
inquiétant
personnage, sorti de nulle part, rodait dans son dos. Si ce
n’est
sa tenue, il ne ressemblait en rien aux autres occupants du lieu.
Une
menace sourde en exsudait et une aura fuligineuse troublait ses
traits.
Luc essaya de faire abstraction de cette ombre funeste qui
s’épaississait
à quelques pas de lui.
Il
posa le plat de sa main droite sur le battant de la porte derrière
laquelle
l’attendait son destin. Il hésitait à franchir le seuil. Il
sentait
tout
le poids de la grosse bâtisse qui cherchait à l’écraser. Pour
mieux
le
retenir dans ce monde. Ce monde auquel il n’appartenait que par
erreur.
Luc inspira longuement et poussa le lourd panneau de bois
patiné
par de nombreuses mains.
Une
nappe à la couleur coincée entre le gris et le bleu, faite de la
fumée
des
dizaines de cigarettes réduites depuis longtemps à l’état de
cendres
ou
encore serrées par des doigts, stagnait sous le plafond. Luc regarda
la
petite vingtaine d’hommes et de femmes, vautrés sur des sofas
entripaillés
et vieillissants ou assis sur des chaises dépareillées et
bancroches.
Ils fixaient d’un air plus ou moins absent une télévision sur
l’écran
de laquelle gesticulait une foule noire faite de silhouettes
perdues
dans la grisaille. Dans le silence laissé par le son coupé,
s’immisçaient
des ricanements gras provenant du côté opposé de la
pièce.
Devant l’unique fenêtre, quatre individus au sexe mal défini
étaient
agglutinés. Tête contre tête, ils oscillaient au son de leur chant
amébée.
Dehors,
de l’autre côté des vitres, son avenir l’attendait, dissimulé
par
la
masse des corps épais, enveloppés dans la rugueuse étoffe
réglementaire.
Luc fit un pas à l’intérieur de la pièce. Quatre crânes se
tournèrent
simultanément dans sa direction. Quatre paires d’yeux le
toisèrent.
Quatre rictus peccamineux se dessinèrent sur quatre
bouches
aux lèvres andrinoples. Luc reconnut l’homme dont la face
raboteuse
ricocha d’un visage à l’autre. Quatre, il était quatre !
Des
étincelles bleues, frêles ambassadrices de la peur, passèrent
devant
les yeux de Luc. Des doigts pissant la soude caustique lui
lacérèrent
les entrailles.
Dehors,
de pâles volutes apparurent et s’enroulèrent autour des arbres
bordant
la longue et sinueuse drève qui s’étirait dans le parc vieillot.
Elles
s’accrochaient, bleuâtres ou cendreuses, à leurs branches
déshabillées
par l’hiver. Sous le regard de Luc, les arabesques de
brume
s’agitèrent et s’étirèrent. Elles obéissaient. Luc se calma,
laissant
se réveiller en lui les myriades d’animalcules qu’il hébergeait.
De
ses doigts, partirent des aigrettes dorées. Il ne fut bientôt plus
qu’une
nébuleuse iridescente.
Dehors,
le frimas répondit. De minces filins d’argent se tressèrent en
des
torons d’acier qui s’amalgamèrent en des aussières obèses et
ardoisées.
Les quatre personnages, sentant l’univers trémuler, se
détournèrent
de Luc et firent face à la fenêtre. Unissant leurs mains, ils
émirent
des éclairs ponceau et cinabrins. Dans un fracas digne du
Pandémonium,
un grelin anthracite fit voler en éclat les carreaux avant
de
s’enrouler autour de l’ectoplasme rougeoyant et sanglant né des
sinistres
adversaires de Luc. Dans une gerbe de larmes sanglantes, les
quatre
acolytes disparurent.
Le
temps d’un battement de coeur, Luc se rassembla. Seule, perdura
sur
son front une étoile d’or et d’argent mêlés. D’un geste
souple, il
bondit
sur le rebord de la fenêtre et tendit le pied vers la liberté.
Dans
son dos, le battant de la porte heurta violemment le mur.
L’infirmier
entra, éveillant à peine la vingtaine de patients assommés
de
psychotropes.
Adrienne
28/02/2016
Alice
n’ira plus au Louvre
Alice
n’ira plus au Louvre.
Alice
veut en finir avec la réalité. Elle ne lui trouve aucune gaieté.
Elle aime le flou que l’on trouve de l’autre côté du miroir.
Alice
a abandonné son métier. Elle veut aller fureter sur d’autres
sentiers. Ceux qui sentent bon la noisette. Elle a décidé de ne
plus jamais repasser à l’envers la fragile porte faite de
frisettes qui s’ouvre sur le pays mouvant des rêves éveillés.
Alice
sourit. Elle s’arrête un instant devant le seuil. Elle secoue les
milles petites
frisettes
qui caressent ses joues ornées de fossettes. La porte est juste à
sa taille.
Nul
besoin de la fiole remplie d’un liquide jaune paille, ni du gâteau
moelleux
fourré
à la papaye.
Alice
frappe dans ses mains. Le vantail remonte dans les entrailles du
ciel. Elle
entre.
Elle quitte son vieux monde artificiel qu’elle trouve si
pestilentiel. Le vert à l’odeur de cannelle des nues la peint à
la hâte de couleurs disparates sous les yeux d’un lapin
providentiel. Son hôte bondit sur ses pattes arrière et ôte ses
gants couleur de pâtes à crêpes. Il les lance en l’air.
Alice
regarde. Elle suit la douce courbe descendante des mains de tissus
qui se
déposent
au fond d’une jatte dans laquelle s’ébattent deux pirates à la
Tom
Pouce.
Avec leurs pieds chaussés de mousse, ils éclaboussent un mammouth
qui passait par là, juché sur un vélopousse. Déstabilisé, le
pachyderme rouquemoute vacille. La moumoute piquée d’oiseaux
captifs qui orne le haut de son crâne glisse le long de son
interminable pif.
Alice
rit. Elle a un geste évasif en direction de la perruque qui s’envole
à la
remorque
des piafs fugitifs. Elle n’a pas de doute, elle doit poursuivre sa
route.
Au
loin, elle écoute le klaxon d’un taxi-brousse. Elle retrousse sa
robe incarnate et court à ses trousses. Elle n’a pas la frousse.
Elle a oublié les carinates enchaînés par les pattes. L’espace
se dilate et mute en ouate écarlate.
Alice
pleure. Une pluie torrentielle fait naître une rivière
artificielle. Le monde
change
de logiciel. Il devient essentiel de trouver un esquif pour échapper
à la
poiscaille
aux écailles imitant le velvet. Elle regrette mais elle est prête à
braver la pagaille. Vaille que vaille !
Alice
bataille. Elle attrape la jatte providentielle, saute à l’intérieur,
bouscule les petits hommes qui se chamaillent. L’eau, née de la
tempête, forme une muraille muette. Une fenêtre s’entrebâille.
Alice
rêve. La tête du lapin, coiffé d’une coquette casquette,
apparaît. L’animal
hoquette
et jette une serviette.
Alice
la cueille. Le tissu rouge, devenu voile, se couvre d’arabesques et
la
recouvre.
Dans un roulement de foudre, son boutre entre dans Douvres.
Alice
ne restera pas à Douvres.
Alice
n’ira plus au Louvre.
Adrienne
03/2016
ALYX
Les poèmes centenaires
n’ont pas tous vieilli
Ils
dorment sous les fagots
de
chaque maison française
ils
s’enflamment à nouveau
quand
on souffle sur les braises
Enfants
en gris sarraus
que
la mémoire réveille
et
claquent les sabots
à
nouveau aux oreilles.
Le
poêle chaud de l’école
dégèle
des sources vives
et
les mots caracolent
des
senteurs nous arrivent.
Les
mêmes nuages passent
sur
nos toits les mêmes ailes
les
mêmes amours trépassent
le
même Azur appelle
Les
phrases se fracassent
les
règles connues explosent
et
en pièces éparses
la
Beauté nue s’impose.
Leurs
vers parfois échappent
et
gardent leur mystère
mais
un Esprit nous frappe
nous
secoue, nous libère.
Ils
enflent nos désirs
leur
donnent de la hauteur
ils
habitent nos délires
nos
révoltes et nos peurs.
Ils
réveillent nos ardeurs
nos
amours et nos îles
et
nous voyons des fleurs
sur
les murs de nos villes.
Ils
nous font le présent
des
fièvres du passé
et
nous offrent des instants
qui
valent éternité.
ALYX
La
vieille dame
Elle
prend son café, au soleil d’avril, derrière sa baie vitrée.
La
vieille dame tricote des mots, brode des jolies phrases,
découpe
des récits dans les tissus colorés de son imagination,
nourrie
par une longue mémoire.
Elle
galope dans la Savane, marche le long des plages,
fait
l’amour dans les dunes, vole sur l’océan.
Elle
retrouve sa voix d’enfant pour tutoyer l’univers,
pour
dire ses colères et ses espoirs,
et
ses questionnements.
Elle
vit quoi. Elle s’offre une vie nouvelle.
Elle
a pourtant presque l’âge
où
ses grands-mères s’apprêtaient à mourir.
Elle
cultive les fleurs de son jardin d’hiver
qu’elle
sème à longueur de cahiers.
Elle
est la première étonnée de les voir pousser,
se
demandant d’où viennent ses curieuses pensées.
Elle
soigne ses chagrins, déroule des senteurs perdues,
fait
vibrer des musiques et des sons,
elle
élève des brises, des bises ou des tornades,
selon
ses caprices, en pleine liberté.
Et
puis elle va, son dossier sous le bras,
livrer
son charabia au Printemps des Poètes.
ALYX
Graines
de Muses
-
Tiens tu es là ?
-
Mais vous me connaissez?
-
Souviens-toi, nous étions dans le même paquet?
-
Nous étions si nombreuses à attendre, à nous morfondre.
-
J’ai bien cru aller jusqu’à la péremption, pas toi?
-
Tu parles, je sentais que je me desséchais complètement.
-
Nous sommes drôlement bien là, maintenant. On a de la chance d’être
dans le même poquet.
-
Elle ne dit pas grand chose la troisième du poquet, pas encore
réveillée?
-
Je dirai plutôt qu’elle, elle a atteint la limite de péremption.
Elle est fichue.
-
Dommage. Moi, je me sens en pleine forme. On y va?
-
Où ça?
-
Dehors pardi, allez, on germe !
Les
deux petites graines tremblent, s’agitent, se trémoussent et se
fendent si bien que chacune lance une petite pousse, verte, tendre,
si mignonne qu’elles en sont toute émues.
Encore
un petit effort, et déjà sous la terre se répand une superbe
odeur.
-
Tu sens ? Nous avons déjà tout notre parfum.
-
Mais je suis un basilic ! Et toi ?
-
Moi aussi pardi, sinon ils ne nous auraient pas semées ensemble.
Allez, on sort.
Elles
n’ont pas pointé plus d’un millimètre de leur tendre petit nez
dans l’atmosphère du jardin, que la pousse la plus fragile dit :
-
Holà, il fait encore frisquet. Et ce vent !
-
Bon d’accord, on attend demain. Mais au premier soleil, on y va.
-
On attendrait pas encore un peu ?
-
Moi, je n’y arrive pas. Il faut que je lève la tête c’est plus
fort que moi. Je vois déjà que dehors c’est superbe.
-
Oh, je regarderai tout cela demain. Tu es bien pressée.
-
Mais il faut qu’on soit visible !
-
Pourquoi donc ?
-
Tu te rends compte si un vrai poète passait ? Sous la terre, nous
n’intéressons que les mauvais poètes, ceux qui rampent avec les
vers de terre, qui parlent de ce qu’ils ne voient pas, de ce qu’ils
ne sentent pas.
-
Et le vrai Poète ?
-
Ah, tu verras, Si, en plus, nous sommes pour lui le premier basilic
de l’année, je peux te dire qu’il s’arrêtera, qu’il nous
regardera, qu’il nous respirera et qu’on l’inspirera. Les vrais
poètes, eux, c’est la Beauté pure. Ils vont écrire sur nous des
trucs qui dureront au moins cent ans ! Et dans cent ans, il y aura un
« Printemps des Poètes » qui parlera encore
d’eux
et donc de nous. Alors, moi je sortirai, « à l’aube à peine
naissante, méprisant la bise ... » comme ils disent,.
-
J’espère qu’ils le disent mieux encore. Moi, je crois que nous
avons plus de chances de
rencontrer
un cuisinier qui salivera en nous regardant grandir.
-
Eh bien, c’est bien aussi, nous mettrons de la poésie dans sa
cuisine.
ALYX
DOMINIQUE
Petite
fantaisie
Inconscient
Violence Beauté
Convulsive
Absurdie Liberté
Cent
ans de poésie
Cent
ans de solitude
Cent
ans de fantaisie
Et
ce badine interlude
avec
tous mes amis
Jouez
si ça vous dit
Arrête
ton char René
Philippe
est soupe au lait
Et
Paul va l'hérisser
-Paul
élu ardéchois-
Tanguy
que Pierre, Yves
De
bonne foi, et Alphonse
Allaient
calmer Jacques
En
ses prés verts
Où
toute pierre reverdit
Et
André dit Le Breton
Prend
un cocktail avec Robert
Un
des nôtres lui aussi
Des
cocktaux rectifie Jean
Et
Raymond est-il d'accord
Que
no
Partirais
tu en Aragon
Louis
propose Henri
Mi
chaud mi froid
Charles
duper Guy? demande
Guillaume
à Paul Linaire
C'est
son dada
argue
le Tzar à Tristan
ou
ne serait-ce pas Vian
Tout
beau rissolant devant
Et
où sont-elles Anna Elsa Nadja
Elles
vous ont tant aimé Cézaire
Allez
venez tous les amis
rejoignez-moi
pour boire un vers
Même
si ça ne rime à rien
Aujourd'hui
ou bien demain.
Dominique
- mars 2016
Remerciements
déjantés à
René
Char
Philippe
Soupault
Paul
Valéry
Paul
Eluard
Pierre
Tanguy
Yves
Bonnefoy
Alphonse
Allais
Jacques
Prévert
Pierre
Reverdi
André
Breton
Robert
Desnos
Jean
Cocteau
Raymond
Queneau
Louis
Aragon
Henri
Michaux
Charles
Péguy
Guillaune
Apollinaire
Tristan
Tzara
Boris
Vian
Aimé
Césaire
Anna
de Noailles, Elsa Triolet
Nadja,
l'amour fou
PAQUES QUI CLOCHE
Sonnés
par tant de saveurs
Sonnés
par tant de douceurs
Ne
plus raisonner à rien
Pas
que penser à demain
Couler
dans la gourmandise
Mousses
lactées des plus exquises
Chavirer
fondant moka
Cacao
amer et gras
Exploser
en bouches truffées
Doux
enchantements enrobés
Panachés
de Nirvana
En
festival d'opéras
Nappées
d'arômes intenses
Noires
ou blanches elles vous encensent
Félicité
se dessine
Dans
un éclair de nougatine
Macarons
badigeonnés
Les
mendiants ont tous craqué
Et
sur une tendre tablette
S'enrober
de Casse-Noisettes
Or
en barre voluptueux
Le
liégeois est tout moelleux
Mais
quand les lapins pralins
Auront
croqué le merveilleux
Et
que fondra le Jeudi Saint
C'en
sera fini pour œufs
Et
ma cocotte passionata
tu
resteras chocolat
HAI
KU ?
Si
tu verses dans la poésie que tu t' rimes en traînant les pieds
Prise
le papier d'Arménie tes écrits sont encenser
Au
clair de ta plume tu ravis les mots
Ton
âme se consume en quelques rondeaux
Ouvre
moi ta strophe juste pour un couplet
Si
elle m'apostrophe tu tiens le sonnet
Je
serai ta muse mon beau madrigal
Et
si ça t'amuse m'aime ta fleur du mal
Autant
de lucioles troueront l'univers
De
tes paraboles affable trouvère
Qu'on
sonne les voyelles mon Alexandrin
S'envole
à tire d'aile au fil des quatrains
Et
moi Léonine ta petite litote
Sur
ta flamme divine je souffle et chuchote
Pour
que tu m'embrasses et cries des mots fous
Et
que tu enlaces mon ébahi cou
Dominique - mars 2016
Un
seul poème
Des
centaines de poésies
flottant
dans l'immensité
un
seul poème je saisis
ce
sera Félicité.
Je
ne raconterai pas ma vie
et
encore moins celle d'une autre
mais
cette histoire peut être la vôtre
sachez
donc juste qu' elle est partie
pour
tutoyer de près les anges
si
bien qu'elle y est restée
pour
vous qu'est ce que ça change
cet
envol vers l'immensité
qui
de la terre semble si noire
mais
pour elle radiante clarté
d'une
autre vie emplie d'espoir
Sourire
pour l'éternité
elle
a rejoint enfin sa mère
elle
a rejoint enfin son père
et
ce bébé mort sitôt né
et
elle chante avec Daniel
son
archange musicien
ils
rient déclament à plein ciel
les
notes de notre destin
je
t'en prie fais nous un signe
un
clin d'oeil de là-bas
promis
nous resterons dignes
et
comprendra qui voudra Dominique
- mars 2016
JEANINE
SOULAC
Rivage
en émoi.
Océan
déchaîné.
Vagues
ensorcelées.
Don
Quichotte de la mer dressé,
Le
Signal attend, fantôme menacé,
Sépulture
fragile de rêves oubliés.
Verrue
égarée,
Promoteurs
rassasiés,
Attente
désespérée.
J.
Marthouret
Poésie
A
l’école, elle se dévoile.
Par
coeur, nous l’apprenons.
Récitation,
elle se nomme.
En
notre coeur, elle s’installe
Et
somnole. Belle et douce.
Applaudie
par le cercle de famille,
Elle
chemine et grandit avec nous,
Jamais
oubliée, au tréfonds des pensées.
C’est
« La chanson des Escargots »,
De
Jacques Prévert
Ou
« Mon Cartable »
De
Pierre Gamara.
Et
de sept à soixante- dix- sept ans,
En
coeur nous disons :
«
…Mon cartable a mille odeurs.
Mon
cartable sent la pomme,
Le
livre, l’encre, la gomme,
Et
les crayons de couleurs,
Mon
cartable sent l’orange,
Le
buisson et le nougat……
Les
longs cheveux de ma mère
Et
les joues de mon papa,
Les
matins dans la lumière
Et
la rose et le chocolat ».
Confidence
pour confidence :
Je
hais les horloges !
C’est
la faute à Baudelaire,
Dont
ces vers illustraient
Un
triste souvenir pieux :
«
Trois mille six cents fois par heure, la Seconde
Chuchote
: Souviens-toi ! Rapide, avec sa voix
D’insecte,
maintenant dit : Je suis Autrefois
Et
j’ai pompé ta vie avec ma trompe immonde ! »
Cyclope
vigilant,
Poésie
de nos coeurs,
En
tous lieux tu te montres.
Et
Supervielle se cache derrière mon miroir.
Au
matin il chuchote :
«
Encore frissonnant
Sous
la peau des ténèbres
Tous
les matins je dois
Recomposer
un homme
Avec
tout ce mélange
De
mes jours précédents
Et
le peu qui me reste
De
mes jours à venir. »
Et
c’est encore Baudelaire
Qui
point à l’horizon bouché :
«
Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur
l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis
Et
que de l’horizon embrassant tout le cercle
Il
nous verse un jour noir plus triste que les nuits… »
En
ami, le poète nous fait ses confidences,
Sans
notes de musique, sans crayons, sans peinture.
Il
dit ce que nous sommes, ce que nous éprouvons,
Nos
rêves, nos angoisses et l’amour et la mort,
Ce
qu’il ressent d’abord et que nous partageons
Ou,
ne connaissant pas, nous allons voir ailleurs.
Dernier
des hommes libres,
Le
poète est artiste.
Il
élève, guide, éclaire.
Nous
nous laissons porter.
Lorsque
je me demande :
Qu’en
est-il de ces gens dans ma vie
Fréquentés
? Que sont-ils devenus ?
Supervielle
me répond:
«
Je bats comme des cartes
Malgré
moi des visages,
Et,
tous, ils me sont chers.
Parfois
l'un tombe à terre
Et
j'ai beau le chercher
La
carte a disparu.
Je
n'en sais rien de plus.
C'était
un beau visage
Pourtant,
que j'aimais bien.
Je
bats les autres cartes.
L'inquiet
de ma chambre,
Je
veux dire mon coeur,
Continue
à brûler
Mais
non pour cette carte
Qu'une
autre a remplacée :
C'est
un nouveau visage,
Le
jeu reste complet
Mais
toujours mutilé.
C'est
tout ce que je sais,
Nul
n'en sait d'avantage. »
Pères
spirituels, amis de longue route, poètes,
Nous
vous aimons.
Et
fi de votre vie, elle nous est infinie,
Machado
vous le dit.
Blotti
sous une dalle, à l’ombre d’un cyprès,
Au
cimetière il réside, en son lointain exil.
D’Espagne
il est venu, à Collioure il mourut.
Et
toujours il reçoit visites sur visites,
Emouvants
témoignages de l’amour qu’il suscite.
En
sa dernière demeure, une boite recueille
Tous
ses courriers du coeur, venus du monde entier.
Et
la boite déborde.
L’art
est universel et sa langue n’est qu’une,
Pour
l’homme singulier en toute création.
N’est-ce
point là notre culture commune
En
ces temps agités de grande mutation ?
J.
Marthouret
ANGOISSE
NOCTURNE
Claire,
Nimbée,
voilée,
Circée
l’enchanteresse,
Confidente
nocturne, lune pleine,
Que
sais-tu ? Que vois-tu, belle muette,
Cyclopéenne
amie ? Où va notre vaisseau fantôme,
Hermès
dévoyé et Gaïa retombée dans les bras de Chaos ?
J.
Marthouret
MONIQUE
Le poète a cent ans
La
tête dans les étoiles,
Il
baisse le regard sur le monde hagard.
Ses
yeux sont de miel, ses prunelles de fiel,
Son
regard se garde de glisser sur le monde.
Il
cille d'une saine intelligence critique.
Son
oeil affûté de poète aiguille sa vie.
Ses
pas sont comptés
Comme
les pieds de ses vers.
Sa
poésie maîtrisée vit débridée.
La
sagesse de ces strophes rime juste.
Il
n'est pas réaliste , il est artiste.
Un
brin polémique, il défie le politique.
Le
dos voûté, il reste à écouter.
Rien
ne lui échappe, il se délecte de l'instant.
Il
s'émerveille par ses sens toujours en éveil.
Il
goûte la vie, la savoure,
La
pense, la réfléchit.
Quand
il sait, il écrit.
Et
quand il sent, il dit.
Cent
ans par cent ans,
La
vie se vit comme une poésie.
Histoire sans
mémoire
Leurs
yeux ont perdu la mémoire,
Leurs
yeux sont perdus dans leurs pensées,
Ils
se sont figés dans le passé.
Réfugiés
dans le lointain,
Égarés
dans le présent,
Ils
se noient dans leur quotidien.
Leur
histoire est sans mémoire.
Leurs
jours se répètent inlassablement,
Leurs
jours se répètent invariablement.
Les
différencier, pour quoi faire ?
Automne,
hiver, printemps, été,
Se
sont écoulés, sont déjà dépassés.
Leurs
saisons sont perdues,
Ils
ne s'en souviennent plus.
Leurs
phrases tournent en boucle,
Leurs
phrases restent en suspend.
Leurs
mots, leurs idées se mêlent,
Leurs
conflits se démêlent,
Angoisses
toujours réinventées,
Dans
leur monde de sénilité.
Il
n'y a plus d'espoir,
L'actualité
est trou noir.
Ils
ne connaissent plus leurs enfants,
Ils
ne connaissent plus leurs petits enfants.
Ils
ont déjà rejoint leurs parents.
Ils
ne sont plus ceux qu'ils étaient,
Personne
ne les reconnaît.
Qui
sont les parents, qui sont les enfants ?
A
quoi bon chercher...
Générations
oubliées...
Monique
Pruvost . 2016
Le
pont des générations
Le
pont des générations :
Un
champ de fleur
Où
les abeilles puisent le miel
Pour
adoucir l’avenir
Le
pont des générations :
Un
puits sans fond
De
la mémoire
Où
le passé est histoire
Généalogie
imagée racontée
Le
pont des générations :
Transmission
des savoirs
Où
chacun lègue sa pierre pittoresque
A
la construction de l'édifice
Le
pont des générations :
Architecture
de son ossature
Le
caractère inné
De
ses traits, de son âme brut
Quand
une berge disparaît
Le
pont des générations
Construit
avec tendresse
Toujours
se redresse
Du
pont des générations
Tels
les piliers d'un aqueduc
Chacun
retrouve son être
A
travers ses ancêtres
Puise
son eau à la source
Pour
la faire rejaillir...
Monique
Pruvost 2016
Avec
des si, on mettrait Paris en bouteille
Avec
des si, on mettrait Paris en bouteille.
Avec
des bouteilles, on chanterait sous la treille
Du
jardin du Luxembourg à celui des Tuileries.
On
boirait Paris jusqu'à la lie :
Bières
sans faux col, rouge vinicole,
Mais
plus jamais ce rouge qui tâche de sang Paris.
Où
est la logique dans tout ça ?
Mais
qu'est ce que la logique ?
Un
tic des parisiens cartésiens
Qui
ont bouchonné leur sens,
Qui
se saoulent de stress,
Se
bousculent jusque plus soif .
Et
si c'était à refaire...
Je
le referais.
Je
mettrais Paris en bouteille
Pour
enivrer les Parisiens
Par
la folie des notes florales.
Qu'ils
sentent des campagnes, le raisin
Et
des fournils, le bon pain.
Cette
bouteille jetée à la mer
Flotterait
sur la Seine
A
la recherche de l'humanité égarée .
Une
ivresse humaine en régal
Dans
la trépidante capitale !
Monique
Pruvost, 2016
SYLVIE
M.
Dans
le cartable de ma vie
Dans
le cartable de ma vie
Flottent
quelques poésies
Quelques
rimes bien choisies
Au
temps des câlineries
Souvenirs
de mon enfance
Dans
les écoles de France
Et
de mon adolescence
Aux
douces turbulences
Pas
une nuit d’hiver
Sans
monsieur Jacques Prévert
Sans
bonhomme de neige
Poursuivi
par le froid
Pas
un enterrement
Sans
les deux escargots
Qui
repartent titubant
Coquilles
sur le dos
Comment
ne pas envier,
Quand
on est dissipée
Maurice
Carême, coucher
Sur
sa feuille l’été,
Trois
limaçons doués
Récitant
leurs leçons,
Quatre
lézards zélés
Faisant
un long devoir ?
Avec
Char, plus tard,
La
poésie transporte
Mes
éclats, mon cafard
Pour
me rendre plus forte.
Mon
professeur aimé
Me
fera déclamer
Eluard,
liberté
A
la Bâtie d’Urfé !
Pour
me donner des ailes
La
couleur des voyelles
Toucher
avec HUGO
Le
lyrisme des mots.
Nous
citions Aragon
L’affiche
rouge nous chantions
Monsieur
le Président
Disait
Boris Vian
Nos
amis désertaient
Objectaient,
insoumis
Nous
remplissions nos têtes
De
subtiles rêveries
Poètes
vos papiers
Criait
Léo Ferré
«
Betty faut pas pleurer »
Nous
chantait Lavilliers.
Je
suis comme je suis
Je
suis faite comme ça
Quand
j'ai envie de rire
Oui
je ris aux éclats
Je
murmure Prévert… Cocteau
Dans
le creux de tes bras
Et
demande : jeune homme
Aux
membres frêles : Es-tu l’amour ?
Je
reste émerveillée
De
cet amour Ardent
Pour
les mots, que tu tends
Ballade
tant aimée !
A
force de m’écrire
Je
me découvre un peu
J’ai
Chédid pour me lire
Les
mots sont comme un jeu.
Sylvie
M.
SYLVIE S.
L'assourdissement
du marteau piqueur, les vibrations de ce pieux métallique qui
s'enfonce de façon saccadée me mine. Je ne m'entends plus respirer,
asphyxiée de poussière de flatras et autres gravats, je me tétanise
. L'air de cette après-midi de début de printemps est dense et
solide, il n'oxygène pas, il englue, colmate, pétrifie. Encore
debout, presque chancelante je n'en peux plus de rendre l'âme, mes
blessures sont multiples, plaies béantes, estafilades, écorchures …
combien de temps pourrai-je tenir, combien de temps me laissera -t-on
agoniser? Il semblerait que certains aient décidé de m'achever, à
moins que ces manœuvres ne soient que les prémices d'un énième
plan de sauvegarde, de survie, de sur envie.
Depuis
ces dernières années, je vis abandonnée de tous les «tout un
chacun». Peu d' attention, quelques miteuses visites, seule, triste,
retirée en moi même. Je dépéris et me souille du temps.
Le temps, en voilà un qui ne se mouche pas du col. Il se promène, hautain, sur de lui, indifférent aux outrages qu'il inflige. Ce Monsieur est un goujat, un pédant, insidieux et sournois. Il vous enjôle, vous cajole, vous enveloppe de jeunesse soyeuse, pour vous mordre avec la hargne et la rudesse de l'âge douloureux. Maudit soit le Temps, fossoyeur de destin. Il nous enlève ceux qui nous ont voulu, qui nous ont vu nous élever, qui nous ont donné de la vie.
Le temps, en voilà un qui ne se mouche pas du col. Il se promène, hautain, sur de lui, indifférent aux outrages qu'il inflige. Ce Monsieur est un goujat, un pédant, insidieux et sournois. Il vous enjôle, vous cajole, vous enveloppe de jeunesse soyeuse, pour vous mordre avec la hargne et la rudesse de l'âge douloureux. Maudit soit le Temps, fossoyeur de destin. Il nous enlève ceux qui nous ont voulu, qui nous ont vu nous élever, qui nous ont donné de la vie.
Le
temps se prend, s'entre..., se contre..., coure après, bon ou
mauvais, perdu ne se rattrape jamais.
Maudit
soit ce Temps. Temps de misère, de galère, temps de colère, temps
inexis...temps.
Temps passé, Temps jadis, Moi je suis là depuis long...temps … cent ans , çà t'en bouche un coin...hein! Le Temps!! Et en cent ans je les ai tous connus, ceux que tu tourmentais, et qui t'auscultaient, te défiaient en te distordant. Les Apollinaire, Cendras, Eluard, Michaux, Ponge et autres Desnos ou Vian, venaient créer et trinquer avec bien d'autres encore
Temps passé, Temps jadis, Moi je suis là depuis long...temps … cent ans , çà t'en bouche un coin...hein! Le Temps!! Et en cent ans je les ai tous connus, ceux que tu tourmentais, et qui t'auscultaient, te défiaient en te distordant. Les Apollinaire, Cendras, Eluard, Michaux, Ponge et autres Desnos ou Vian, venaient créer et trinquer avec bien d'autres encore
Moi,
je me suis dressée, je me suis édifiée, gonflée pour tous les
accueillir. Je les ai protégés, abrités aussi. Ils m'ont fait
vivre, m'ont nourri, m'ont fait grandir, m'ont fleuri, m'ont embelli.
Certains m'ont même fait décorée!
En
cent ans j'en ai connu des chemins, des vies, chagrins et destins.
Aujourd'hui
, beaucoup est à faire, je me délabre, trop d'errance, trop de
substance, trop d'ignorance, trop d'outrance… mêlées.
Mais
je suis en chantier, je sommeille et surveille, espère l'émotion
d'une nouvelle génération. Je suis prête à toutes les admirations,
offrant
mes entrailles en lieu d'habitation. Jeunes illuminés, venez me prendre
et m'habiter.
N'ayez
pas peur, approchez vous de ma lueur, ne soyez pas intimidé,
mes fenêtres sont cassées, mes murs lézardés, mais ma porte, toujours
ouverte et mon toit sur vos têtes vous invite à faire la fête.... la fête
dans la maison des poètes.
Sylvie S.
FREDERIC
Cent
ans de poésie
La
poésie n’a pas d’âge pas plus que de mémoire,
Elle
passe dans un souffle, irréelle, fuyante.
Sans
temps elle
erre, elle muse et flâne
«
Ô temps suspend ton vol » nous disait Lamartine.
Les
siècles en ont vu s’entasser les grimoires,
Où
elle est tour à tour aveugle ou bien voyante.
Vécue,
elle accumule, elle découvre et glane,
Amoureuse,
orgueilleuse, morbide ou libertine.
Pourquoi
donner un âge à cet art incertain
Qui
virevolte au mépris de l’avancée des jours ?
«
J’ai plus de souvenirs que si j’avais mille ans »
Dit
Baudelaire sentant
venir
l’intemporel.
Les
poètes n’ont cure du proche ou du lointain,
Dans
les limbes à jamais se situe leur séjour,
Oublieux
de leurs heures, mais au vers vigilants,
L’esprit
est la matière, le texte est corporel.
Prosodie
endiablée ou alexandrins riches,
Cent
taons peuvent
la piquer, comme elle peut nous bercer.
Le
poète mille fois se remet à l’ouvrage,
Pénélope
de la rime, Homère de la métrique.
Rimailleur
ou génie, le poète défriche,
Il
se sait embarqué pour une longue traversée.
Sa
rime n’est pas un but, ce n’est qu’un long voyage,
Où
les mots, les idées et les vers s’intriquent.
Sang
tant et
tant, versé pour la cause suprême,
Celle
du sentiment pur, de l’orgueil blessé.
Sueur
cérébrale nimbant de buée vague
Les
émotions ultimes et les amours rêvés.
Langueurs
des jours éteints, palpitations extrêmes,
Dans
quel état d’esprit nous avez-vous laissés ?
Nos
coeurs enflammés à tout jamais divaguent
Au
souvenir ardent par la rime soulevé.
Oublions
donc ce siècle, le poète est sans âge.
Son
oeuvre se fait seule, sans
tant compter
le temps.
Elle
est comme un tableau, déroutant paysage,
Qui
traverse les jours, éternel printemps.
FF
12/15
Honni
printemps
Je
hais le printemps, cette saison heureuse !
Où
tout revit, où tout redémarre.
Les
autres l’aiment, moi j’en ai marre !
Saison
vide, saison creuse.
Les
bourgeons, les petits oiseaux,
La
tiédeur de l’air, les fleurs,
Les
écureuils qui pointent leurs museaux,
Les
espaces verts enjôleurs.
C’est
trop facile !
Avec
des trucs comme ça,
Tout
le monde est content !
C’est
du bonheur qu’on ensile,
On
suit bêtement la doxa,
On
trouve tout épatant !
Je
hais le printemps, cette saison bénie,
Où
tout va mieux parce qu’il fait beau.
C’est
la fin de la neurasthénie,
On
sort enfin du tombeau.
S’il
suffisait d’une d’hirondelle
Pour
que tout s’arrange,
On
lui devrait une fière chandelle,
Ce
serait plutôt un ange.
Mais
c’est pas vrai, on nous ment !
La
saison ne change rien !
Ce
foutu printemps charmant,
Ce
n’est qu’un petit vaurien !
Pendant
le printemps, c’est comme toujours.
On
est malade, on a des ennuis, on meurt.
On
s’en fout des beaux jours,
Hors
desquels tout demeure.
Au
moins, en été, on a trop chaud.
On
transpire, on se déshydrate.
On
rate son bachot,
Au
cours bouillon la rate !
Au
moins, en hiver, on a trop froid.
On
grelotte, on attrape la crève.
Tous
les jours on porte sa croix,
On
sent bien que la vie est brève.
Au
moins en automne on sait pas trop.
Les
feuilles tombent, il fait frais.
L’été
est dans le rétro
Et
l’hiver futur effraie.
Je
hais le printemps, cette saison fallacieuse,
Qui
nous berce d’espoirs,
De
promesses délicieuses,
Nous
autres, les pauvres poires !
Ah
! Que viennent les saisons standard !
Le
même temps toute l’année.
Pour
la météo, plus besoin de radars,
Toutes
les saisons simultanées.
Des
feuilles où on veut quand on veut.
Des
fleurs ou pas, selon ses voeux.
Le
chaud, le froid, au thermostat,
Au
choix, tristesse ou fiesta.
Pareil
pour la pluie et les nuages,
Ce
qu’on veut où on est
Pour
le soleil ou pour l’ombrage,
A
chacun son robinet.
Ça
ce serait la liberté !
Mais
va y avoir un problème,
Faudra
se concerter,
Qui
tourne le thermostat ? Moi-même ?
FF
03/16
VOS
THONS !
Finie
la tribune
Ambitieux
Sarko
Quand
t’es à la une
C’est
pour un fiasco
Ton
étoile est morte
Abandonne
le jeu
Des
gars de ta sorte
Sont
des têtes de noeud.
T’as
promis la lune
On
t’a pris au mot
Hollande
sans rancune
Tu
sais qu’c’est pas beau
Malgré
ton escorte
Qui
te fait la cour
Le
diable t’emporte
Avec
tes discours.
T’avais
des lacunes
Au
gouvernement
Juppé
l’infortune
C’est
pour çui qui ment
T’as
payé pour l’autre
Tout
l’monde s’en souvient
Maintenant
c’est nos votes
Qui
t’feraient du bien.
T’es
inopportune
T’as
d’mauvaises idées
Le
Pen la fausse brune
On
va t’trucider
Tes
pensées malsaines
Tu
peux t’les garder
Faut
quitter la scène
Ou
bien t’suicider
Quand
on lit les unes
On
en voit plein d’autres
Malgré
leurs lacunes
Y
s’croient bons apôtres
Ils
cherchent la gloire
Mais
sont bons à rien
Ils
veulent le pouvoir
Sans
nous faire du bien.
Communs
et communes
On
voudrait aut’chose
Quelqu’un
ou quelqu’une
Qui
soit en osmose
Avec
nos problèmes
Et
tous nos ennuis
Bref
quelqu’un qu’on aime
A
qui on dise oui.
F.F.
Forgée par des siècles d’expérience, la philosophie des cartons à chapeaux mérite d’être étudiée, même et surtout si elle est méconnue. Nombre de penseurs l’ignorent ou la dédaignent. Que l’on n’en trouve aucune trace avant l’invention du carton à chapeau, c’est compréhensible, voire même logique.
Un être pensant ne peut pas penser avant que d’exister, c’est un fait clairement établi par le Cogito de Descartes. Ou alors sous une forme métaphysique, par essence inaccessible à l’esprit humain. Par contre, dès l’apparition du carton à chapeau et à partir de la structuration de sa philosophie, nul écho chez les penseurs contemporains. Très tôt, c’est le silence sur ce sujet, chez Kant et Hegel. Comme on pouvait s’y attendre, Auguste Comte nie la scientificité de cette philosophie, allant jusqu’à mettre en doute son existence. Karl Marx est encore plus radical, puisqu’il réfute en bloc cette philosophie, au motif qu’elle est bourgeoise et en tant que telle, amenée à disparaître avec la dictature du prolétariat.
Au XXe siècle, la situation n’est guère meilleure. Un seul penseur d’envergure, le roumain d’expression française Emil Cioran, va réfléchir constructivement sur les éléments disponibles de cette philosophie. En particulier dans le cadre de son approche sur les contenants vides. Dans une étude de 1923, « De la vacuité du vide chapelier », il démonte les rouages principaux de cette pensée en évoquant le vide des cartons qui contiennent le vide des chapeaux qui contiennent le vide des têtes humaines. Analyse fulgurante s’il en est, même si elle demeure empreinte de pessimisme, à l’instar de toute l’œuvre de Cioran.
L’autre philosophe marquant du XXe à s’être penché sur la philosophie des cartons à chapeaux est Martin Heidegger. Bien qu’il l’ait fait de manière marginale dans son grand-œuvre, « Etre et temps », il prend le point de vue inverse de celui que Cioran développera plus tard en évoquant les contenants des contenants des contenants des pensées.
En toute logique, lorsque Jean-Paul Sartre, très influencé par Heidegger publie « L’Etre et le Néant », on s’attend à y trouver davantage qu’une allusion à la philosophie des cartons à chapeaux, mais c’est compter sans les effets de la mode et du temps.
Le temps d’abord. Lorsque cet ouvrage majeur de Sartre paraît, en 1943, en pleine occupation allemande de la France, il est impossible d’évoquer ouvertement le rôle du carton à chapeau qui, par définition enferme la pensée. C’eut été le meilleur moyen d’attirer l’attention de l’occupant sur une comparaison hardie avec sa tyrannie liberticide et de se retrouver ipso facto en prison, voire pire. On sait que Jean-Paul Sartre était un grand
résistant, mais de l’intérieur. Pas de l’intérieur du pays, de l’intérieur de lui- même. C’est à dire qu’en fait, il était le seul à savoir qu’il résistait. Ce n’est qu’après guerre, dans « Les chemins de la liberté » qu’il parlera brièvement des cartons à chapeaux, et encore, essentiellement en tant que boite à objet.
Et c’est ici qu’intervient le second facteur délétère : la mode. Au lendemain de la seconde Guerre mondiale, l’usage de chapeau va se perdre peu à peu. Et avec lui, celui du carton. En effet, philosophie mise à part, que faire d’un carton à chapeau si l’on n’a pas de chapeau ? C’est du reste un des piliers de la philosophie des cartons à chapeaux qui pose que le carton à chapeau ne peut avoir de pensée propre. Toute l’approche de la philosophie des cartons à chapeaux repose sur celle des chapeaux eux-mêmes. Les disparition des couvre-chefs entraînant celle de leurs contenants, elle signe également l’arrêt de mort de leur pensée.
Il est néanmoins une idée forte de la philosophie des cartons à chapeaux qu’il convient de garder en tête, c’est celle de sa supériorité. Dès leur origine, les cartons à chapeaux ont posé cet axiome qu’ils seraient supérieurs à l’humain dans la pensée, au motif indiscutable qu’ils contenaient le melon de l’homme susceptible d’avoir la grosse tête.
F.F.
FLEUR
1 Cent fois cent ans de poésie mais ma mère est toujours la même mère insupportable et tyrannique. Cent fois cent ans de poésie, mais les cul de jatte ne prendront jamais de bain de pieds. Cent fois cent ans de poésie et le clochard sous la porte cochère sera toujours le clochard sous la porte cochère : la gueule boursouflée, tuméfiée sous l’oeil gauche, fendue comme un fruit trop mûr en plusieurs endroits, si bien qu’on jurerait qu’il a plusieurs bouches cousues à la vavite sur le visage, l’élocution contrariée par l’inégale répartition des dents sur la mâchoire, et cependant bavard, apostrophant les passants sidérés d’entendre parler ce gros fruit pourri posé en équilibre sur un amas de chair cuite dans la pisse et la vinasse, une mouche pour seule compagne. Quand la vie fait sa putain, les poètes versifient et les clochards ont le coeur crevé.
2 Cent fois cent ans de poésie jamais n'aboliront le règne révoltant des objets. Nous sommes quelques hommes au milieu des choses : nous passons, ils restent et se transmettent de génération en génération, solides, froids et impassibles comme au premier jour. Les hommes les
façonnent sans soupçonner que c’est une armée de soldats sournois dont ils s'entourent. Les lampadaires qui se jettent contre l'homme titubant, les portes qui écrasent les doigts de l'enfant, les pots de fleurs qui assomment le piéton, les couteaux qui blessent la cuisinière. Et quand la vie fait sa putain, les objets restent imperturbables, sourds à mon
angoisse : je voudrais les briser, alors je donne dans un banc le coup de pied le plus malveillant de toute l'histoire des coups de pieds. Le plus humiliant n’est pas la douleur mais le fait de n’avoir même pas entaillé l'arrogance de ce morceau de bois juché sur deux pieds de fer. Je les ai
tellement épiés que j'ai fini par comprendre : la force des objets c'est de ne pas lire et écrire de poésies.
3 Cent fois cent ans de poésie et je suis toujours le jouet de mes émotions. Je suis un ridicule petit pantin fait d'une volée de bois vert, sur la figure duquel on a peint un sourire indélébile et deux ronds rouges pour les joues. Je suis cette petite chose stupide et palpitante, cette âme
vibrante à la recherche d'une fusion. Quand la vie fait sa putain, et que je n'arrive pas à ajuster ma petite personne au monde extérieur, je porte un noeud papillon pour convoquer l'homme en moi. L'homme en moi est taillé
pour la vie telle qu'elle est, il vit en toute simplicité, les mains dans les poches, campé sur ses deux jambes, tête nue et la pensée au vent. Je sais bien au fond de moi qu'il suffit que quelqu'un dénoue ce noeud papillon pour que je redevienne femme. Mais ceci est une autre histoire
Fleur
MARIE
MARIE
Le
parc des sources, le bel endormi
Joliment
appelé, doucement déserté, ce parc boisé de platanes, de
tilleuls, d’ormes et de marronniers est tout aussi impressionnant
que majestueux. Les troncs de ces arbres centenaires sont postés
tels des cuirassiers au garde à vous ayant pour mission
d’accueillir l’impératrice Eugénie.
Ils
sont plantés si harmonieusement que les oiseaux hitchcockiens nichés
sur leurs opulentes ramures croassent de cime en cime sans pause
silence. Ils sont noirs, menaçants et bombardent de leur fiente les
bancs publics ou les promeneurs surpris.
Certaines
de ses allées sont bosselées par des racines rebelles qui émergent
du sol, fragilisant le pas déterminé des marcheurs audacieux.
Sa
traversée à la nuit est cauchemardesque. Le ciel sombre éclairé
par quelques réverbères épuisés rend l’atmosphère oppressante.
On pourrait même imaginer quelques morts nostalgiques se baladant
sans crainte de croiser un insomniaque.
Ce
vaste espace entre le hall des sources et l’Opéra a eu son heure
de gloire au siècle dernier. Les belles dames se croisaient, se
dévisageaient, se jalousaient quand elles se promenaient sous
l’élégante galerie les jours de pluie. Quant aux messieurs, ils
gardaient en main leurs chapeaux, leurs gants, leurs canes et
conversaient secrètement.
Aujourd’hui,
des lycéens s’y rencardent à la sortie des cours pendant que
quelques rappeurs jusqu’à une heure tardive, clouent le bec des
corbeaux de leur musique rythmée.
Il
est défraîchi, déserté, sa splendeur d’autrefois s’est même
estompée...
Situé
en plein cœur de Vichy, il reste noble, romantique, poétique mais
tellement triste !
Pourquoi
ne pas en faire un lieu de « Rendez-vous Littéraire » en
compagnie d’Apollinaire, Césaire, Vian, Prévert et tant d’autres
à la voix plus discrète comme ceux de l’atelier d’écriture…
Utilisons
les deux kiosques Presse qui se désespèrent pour informer les
promeneurs d'actions éphémères. Théâtre imaginaire pour y faire
des lectures de nos écritures et de nos grands classiques
accompagnés par des musiciens à l'âme passionnée ?
Et
pourquoi pas, aux Fêtes Napoléoniennes, organiser des balades
littéraires ?
Flânons
comme au siècle dernier, réveillons notre "bel endormi"
et
créons
le premier "Concert de mots" !!!
Marie
Je
souris aux passants déroutés.
Je
pleure d’être seule à pleurer.
Je
hurle à
l’écho qui me répond.
Je
récite des histoires à voix haute.
J’écris
des lignes pour me lire.
Je
me mire et je me vois.
J’erre
sans en avoir l’air.
Je
rêve de mon je.
Je
mange ce que je veux.
Je
dors avec mon je.
Je
dis ce que je crois.
Je
pense et je suis.
Je
suis et je médite.
Je
médite et j’imagine.
Je
imagine et je
joue.
La vie est un Je,
mais sans toi, ce n’est pas du jeu ! Car
Sans ton regard, je m’éteins.
Sans
tes larmes, je me dessèche.
Sans
ta répartie, je me tais.
Sans
ton écoute, je me disperse.
Sans
ton œil, je m’illusionne.
Sans
ton miroir, je me vois floue.
Sans
ton bras, je m’égare.
Sans
tes chimères, je fabule.
Sans
ta cuisine, je dépéris.
Sans
ton désir, je dors.
Sans tes critiques, je m’impose.
Sans
toi, je ne pense qu’à moi.
Sans
ta folie, je suis trop sage.
Sans
ton amour, je me fane.
Sans
ton Je,
pas de jeu.
Marie
DICTEE DE PRINTEMPS : samedi 2 avril 2016
Que j’aie
une propension à l’inconstance, voilà qui ne fait aucun doute et
cela ne date pas d’hier. J’en suis fort marri, quoique je n’y
puisse mais.
Plutôt que
de m’alarmer sans cesse de mes revirements d’opinions, je préfère
me dire que mon tropisme pour la palinodie fait partie intégrante de
mon idiosyncrasie. Il n’est rien de tel que de faire sien un défaut
pour qu’il se change, ipso facto, d’ennemi en camarade.
Ainsi, ces
hésitations, ces atermoiements sans fin deviennent-ils des
compagnons de route. Des idées baroques et farfelues m’environnent
de toutes parts, telles des papillons voletant dans l’air tiède
d’un éternel été.
Je ne
m’inquiète plus de savoir si ma conviction, demain, sera
différente de celle d’aujourd’hui, puisque je sais déjà que
celle d’après-demain sera autre encore.
En lieu et
place des affres de l’indécision, je navigue désormais dans
l’apesanteur éthérée d’un tourbillon de pensés antagonistes,
toutes différentes, mais toutes semblables en ceci que j’en
changerai d’un jour l’autre.
Je me sens
prêt, de la sorte, à affronter l’existence grâce à l’énergie,
pour ainsi dire cinétique, que cette procrastination perpétuelle me
procure. A un certain stade, l’irrésolution devient un moteur,
puisque plus rien n’est immobile ni définitif.
C’est
avec sérénité que j’attends mon jour ultime, celui que la mort
aura choisi pour m’emmener, car je sais déjà que je remettrai au
lendemain ce pénible événement…
Frédéric Fossaert
L 'HIVER DES POETES
Samedi 5 décembre 2015
Samedi 5 décembre 2015
Démon
de glace
Ses
dents blêmes
Rendues
acérées par la haine
Transpiraient
des larmes de croquemitaine
Pareilles
à des décoctions de chiendent.
Ses
yeux nivéens
Etrécis
par la rage qui aliène
Exsudaient
des hurlements muets de sirènes
Pareils
à des cauchemars obscènes.
Ses
doigts glacés
Durcis
par la folie meurtrière
Arrachaient
des lambeaux de chairs familières
Pareils
à des scories de cimetière.
Perdue
dans un océan terrible
Tordait
des mots arrachés au livre indicible
Pareils
à des monstruosités irrémissibles.
LE
VIEL HOMME ET L’HIVER
Les deux pieds posés à
plat, le vieillard attend.
Sur ses genoux noueux,
couché un chat sommeille.
Le jour s’effiloche, ni
joyeux ni palpitant
S’étirant de l’aube
grise au soir vermeil.
De son fauteuil, il
surveille l’hiver inquiétant
Bien tôt abattu cette année
sur Montfermeil.
Déjà les premiers flocons
tombent en virevoltant
L’entraînant doucement
dans un demi-sommeil.
Maintenant l’année est
vieille comme lui est vieux.
Doucement ses journées à
elle se raccourcissent
Cependant que ces jours à
lui s’évanouissent.
Elle, elle renaîtra au
détour d’un jour pluvieux.
Mais pour lui, point de ce
bienheureux artifice.
Chaos
Léa
est fatiguée. Rien ne s'est passé comme prévu aujourd'hui. Le
Louvre a vécu une journée de folie et elle sort de la pyramide de
verre avec soulagement. Elle laisse derrière elle les hommes de
guerre. Une pluie torrentielle tombe alors qu'elle rentre à pied.
Elle est trempée de la tête aux pieds quand elle insère sa clef
dans la serrure.
La
porte se referme avec un bruit de succion dans son dos.
Léa
lance son imperméable gorgé d'eau en direction du perroquet de
bois. Il tendait ses doigts vers le plafond.
À peine effleuré, le
meuble mué en volatile jaune et rouge s'élance en jasant et
sifflant vers un ciel émeraude où quelques nuages cinabrins
s'effilochent en batifolant.
Dans
son maillot de bain en lamé de cuivre entremêlé de larmes de
crocodiles, Léa s'avance sur le pont du paquebot qui fend une mer
pourprine.
Son
bikini de plus en plus déliquescent coule à ses pieds - qu'elle
possède délicats - et forme une flaque tremblotante et gélatineuse.
Après un moment d'hésitation, ce liquide incertain et iridescent se
dirige vers le perroquet qui s'est posé à quelques pas et qui le
gobe, gobe... lait.
Devenu
voilure, le volatile rejoint le mât de hune. La caraque née du
paquebot file bon train quand elle se met à donner de la gîte sous
l'œil froid du lièvre qui bondissait hors du sien…
Léa,
déséquilibrée un instant par le rude tangage du bateau, se glisse
à l'intérieur de la bauge de l'animal à la fourrure couleur de
cachou. Cachou Lajaunie ?
La
jaune jeune femme atterrit dans cette tanière étroite. Nue comme un
ver… de terre, elle déloge la reine de cœur qui se terre, terrait
dans l'antre du chapelier fou.
Léa,
Alice ? Alice, Léa ? Non, Non !
Avec
LeWis, le Wis, né du sourire évanescent du chat du Cheshire, elle
la poignarde avec ire, messire.
Du
sang craché jaillit une corolle… Caroll, périanthe, calice …
Alice, Alice ? Non, Non ! Calice plein du lait de l'ânesse…
ânesse de Buridan, plus fine et moins sotte que son frère car
élevée par Ockham. Le roi du rasoir et pas de cœur comme la reine
morte avec son Wis planté dans son calice plein du lait de l'ânesse
sœur.
Plonge
Alice et ressort Cléopâtre aux traits de Liz.
La
Liz de Richard, pas Cœur de lion ! Mais Burton ! Pas celui
des fringues ! L'autre, l'autre !
Alice,
Cléopâtre ? Cléopâtre, Alice ? Non, Non !
Oui,
mais la pyramide, Cléopâtre-Liz, elle connaît. Et blanche et
dégoutante du lait éburnéen qui sèche et colle, elle aiguise, et…
Gizeh, le bec de l'oiseau lyre Icare… et ment jusqu'à cent, cent
qui s'envole jusqu' à mille, mille y gramme.
Am,
stram, gram. Pic et pique… la pointe de la pyramide de verre… du
Louvre où Alice-Cléopâtre-Léa habillée de pied en cape est
doucement déposée par Icare juste après le bord de la nuit.
Léa
secoue sa chevelure d'ébène. Deux ou trois gélules alizarines
cliquettent en rejoignant le sol et roulent. Le jour se lève,
repoussant la brume albugineuse.
Léa
tapote machinalement ses deux talons l'un contre l'autre. Les ailes
de Mercure se détachent et deux gouttes de bel argent s'enfuient à
tire-d'aile pour se fondre loin d’elle dans le Dédale de la grande
citadelle éternelle.
Léa
sourit, soupire, s'étire et fixe le mastaba de verre qui s'éclaire
sous l'étreinte auréoline du soleil en éclatant en milliers
d'étincelles. Une nouvelle journée commence.
Une bombe explose !
ALYX
La
vieille dame
La
vieille dame est entrée dans le blanc de l’hiver.
La
sève s’est figée, ses mains sont craquelées,
Noueux
comme du vieux bois, les doigts sont arrêtés,
Plus
de mailles à l’endroit, plus de mailles à l’envers.
Sa vie
s’est enveloppée d’un manteau de silence.
Elle
se laisse glisser, muette et résignée,
Sur
une pente douce où la peine est feutrée,
Où se
calment sa peur et son chagrin immense.
Dans
les brumes de l’oubli, peu à peu elle s’efface,
Laissant
filer les choses auxquelles elle tenait tant,
Elle
regarde disparaître autour d’elle les gens.
Dans
un coton de neige, elle quitte bientôt la place.
Tout
ce qu’elle a donné est planté bien vivant.
C’est
au coeur des siens que viendra son printemps.
Aimer
l’hiver
Il
faut aimer l’hiver
Puisque
nous y allons,
Aborder
sans colère
La
dernière saison.
Apprendre
les pensées
Qui
bien souvent réclament
Plus
de ténacité
Et une
belle force d’âme.
Nos
pas se font plus lents
Et nos
vieux corps se glacent
mais
nous avons le temps
de
cultiver la grâce.
Bien
des beautés s’effacent
Sous
la neige et les ans
Mais
d’autres les remplacent
qui
valent au moins autant
Ce
n’est plus le grand feu
D’un
soleil tout donné,
Mais
qu’il est doux le jeu
Où il
faut le créer.
DOMINIQUE
Peur
de lit vert
Elle
éteignait la lampe – je détestais cet instant- et j'avais déjà
tenté plusieurs rappels, pour un petit massage du pied, pour un
bonbon improbable (j'avais brossé mes dents), pour un dernier câlin.
Maintenant
c'était sans espoir. Clap de fin. La porte se refermait à tire
d'elle, l'emportant à mille années-lumière.
Au
mieux je coulais dans un long sommeil réparateur qui ranimerait ma
jeune vie trépidante pour un lendemain plein d'espoir.
Au
pire je tâtonnais dans le noir, apeuré, désorienté, me perdant
dans un gouffre indécis, flottement de réminiscences d’un jour
écoulé, d’abstractions de la nuit.
Le
parquet craquait. D'imperceptibles froissements murmuraient
m'assourdissaient. Des ombres noires me frôlaient. Pays hostile et
froid. J'étais pétrifié, mes peurs raclaient mon lit glacé. Un
siècle de flocons couvraient mon souffle blanc, la lune blafarde
fuyait le vent cinglant.
Avais-
je franchi une porte, un passage maléfique, basculé dans l’ abîme
malfaisant, satanique ?
Rebrousser
chemin, trouver la sortie, le grand jour, et fuir loin de là pour
toujours.
Cela
m'était impossible. Une énergie invisible m’agrippait, m'engluait
dans ses ondes néfastes, me glaçait le sang. Sortir de ce piège à
chagrins. En vain.
Je
criais de toutes mes forces, ce n'étaient que sons fluets, atones;
je voulais déguerpir à toutes jambes, mes pas s'affolaient dans un
sur-place épuisant et aphone.
Et
puis soudain ce hurlement crevant les ténèbres, familier: c'était
bien ma voix que déchirait la terreur, trouant le ciel. Elle
ricochait dans la nuit étoilée en échos salvateurs pour échouer
sur l'astre éblouissant qui m'emplissait à présent de sa
magnificence aveuglante, inespérée.
Adieu
catacombes, j'émerge dans le parfum triomphant de «l'Air du Temps».
Une
aile intemporelle effleure mes cheveux, j'ose enfin ouvrir les yeux.
La
lumière éclabousse ma vie. Je reviens dans mon lit.
Ah
vous dirais-je Maman…
Un
ange, une madone? est penché sur moi, solaire, sa main protectrice
auréole mon front blanc, bonheur ô combien rassurant.
C'était
bien Elle, lumineuse, la Reine éclairée de mes nuits d'enfant.
Clocher
tors,
i
libre
La
neige goutte à goutte
Regarde
fondre le jour
Le
clocher ploie sous l’air glaciaire
Des
pêchers d’un monde banni
Le
ver est dans le fruit
Et
les âmes trop tard réunies
Pleurent
sur l'homme solitaire
Poète
dresses toi prends ton bâton
Car
le chemin sera long
Tous
ces murs à franchir
Tous
ces ponts à construire
Tu
gèleras tous leurs chagrins
Au
porte-mental des haines
Tu
plongeras leurs délires vains
Au
garde-fou des peines
Vas
papillon de nuit inspirée
Voles
à la vitesse de l'obscurité
Afin
que tes vers éphémères
Libèrent
le piège à rêve amer
Que
dans leur naissante clarté
Ils
luisent jusque sur les mosquées
Et
arrosent de tes yeux las
Le
temps qui passe et sonne le glas
Tandis
que moi si sure
Je
sais qu’il est bien tard
Ce
monde quelle imposture
Bleuira
dans le noir
De
ma mémoire trouée
Pleurent
mille calas mitées
Dont
les pétales blancs filochent
Au
goutte à goutte de mes pensées
Et
si la brume au son des cloches
Tarde
à mouiller mon front brouillé
Le
long du lent néon latent
Je
glisse et sombre dans le néant
FLEUR
-1-
Un
mardi, en revenant à pied du marché, avec ma mère à qui je
donnais encore la main, j'ai vu Tolstoï venir à notre rencontre.
J’avais neuf ans, et sans les avoir jamais lus, je connaissais le
nom et le visage des quelques grands auteurs que mon père me
montrait en photo sur les pages d'un gros livre. J'avais hérité de
son admiration pour chacun d'entre eux, je ne pouvais pas ne pas
reconnaître Tolstoï. J'avais le souffle coupé, mais ma mère me
pressait, elle chantonnait presque de son ton enjoué "Viens,
je vais te présenter !"
Tant de légèreté m’affolait, j'aurais préféré quelque chose
de plus solennel : c’était Tolstoï tout de même ! Mais ma mère
était ainsi, gaie et folâtre. Et de surcroît fort ignare
puisqu'elle s'est adressée à Tolstoï en ces termes : "Monsieur
Loezic, je vous présente ma fille !" et se tournant vers moi
elle a ajouté "Monsieur et Madame Loezic ont un merveilleux
jardin dans lequel tu aimerais jouer !" Elle désignait au-delà
de la place de l'église un vieux mur de pierres. J'ai compris ce
jour-là que ma mère ne voyait pas les choses de la même façon que
le commun des mortels. Malgré la honte qui me brûlait les joues
pour elle, j’ai pensé qu’il valait mieux la laisser dans
l’ignorance, d’autant plus que Tolstoï ne paraissait pas se
formaliser de la méprise. Peut-être même s’en amusait-il en
secret.
-2-
Elle
vient d'avaler une assiette de légumes verts, et reste un moment à
table, après le déjeuner, repue et satisfaite d'avoir mangé
sainement pour une fois : au lieu des sandwich quotidiens, elle
a cuisiné et dégusté de bons légumes cuits à l’huile d’olive.
Elle les imagine avec satisfaction, encore sous forme de rondelles,
dans ce petit sac que l'on appelle estomac.
Elle pense à Frida Kahlo et au tableau que l'artiste aurait pu en
faire : un autoportrait en robe bleue, assise sur une chaise verte,
les mains sur les genoux. A partir du cou, juste sous le menton, le
tuyau rouge de son œsophage apparent coule par-dessus la robe,
jusqu’au niveau du ventre où il s’arrondit en une petite bourse
rouge elle aussi, avec quelques rondelles vertes gentiment étagées
les unes sur les autres. Le fond du tableau est jaune ou peut-être
lilas, et une grande sérénité se dégage de cette vision. Elle
décide que de toute l'œuvre de Frida Kahlo ce tableau est son
préféré. Elle se rend bien compte de la part d'orgueil qu'il y a à
adorer un tableau imaginé par soi. Comme elle le décrit à son
chat, il reste silencieux et semble perdu dans la contemplation d'une
chose sur la cloison juste derrière elle. Elle conçoit tout à fait
qu’un carnivore comme lui puisse méditer sur un tableau où
l’œsophage et l’estomac sont apparents. Le trouvant si
concentré, elle se retourne pour suivre le regard du chat, dans
l'espoir enfantin de voir son Frida Kahlo pendu au mur, juste
derrière elle : elle n'y trouve que le Monochrome blanc d'Alphonse
Allais, intitulé « Première
communion de jeunes filles chlorotiques par temps de neige ».
-3-
Mon
amour,
Je ne
vis que pour l'instant où je vous retrouverai ce soir. Seul avec
moi, c'est ainsi que je vous veux. Je déteste l'idée de vous
partager avec d'autres.
Je
regarde parfois vos photos : j'aime votre dégaine. Je vous aime en
noeud papillon, je vous aime en veste trouée, je vous aime tête
nue, je vous aime fumant, je vous aime de profil, je vous aime
détendu, je vous aime dubitatif, je vous aime souriant, je vous aime
sérieux, je vous aime perdu, je vous aime concentré.
J'aime
les moments que l'on partage au café, ou sous les arbres, ce temps
suspendu où nous sommes seuls au milieu de la foule.
Mais
j'aime surtout lorsque la journée prend fin et que nous nous
installons, vous et moi, sur le vieux canapé rouge. J'aime la façon
dont vous me racontez ces histoires de votre Mississipi natal. J'aime
quand, les jours où je suis triste, vous me chuchotez qu'entre le
chagrin et l'absence d'émotion, vous préférez le chagrin.
Aussi,
mon amour, où que vous soyez, et quel que soit le lieu où désormais
vous promenez votre jolie petite gueule, sachez que je vous aime. Et
je me fous que vous soyez sourd à mon amour, sous prétexte que vous
êtes mort dix ans avant ma naissance : William Faulkner, je vous
aime !
MARIE
1
C’est
un poème monorime tout simple de 5 pieds ou 6 pieds. Pas renversant,
je vous l’accorde mais le compte est bon !!!
C’est
un vendredi treize
Par
un soir d’hiver
Que
Paris, ville lumière
A
vécu l’enfer
A
la terrasse se désaltère
C’est
déjà hier
Ensemble
à un concert
C’est
encore hier
Musique
et bonne bière
C’est
sans commentaire
Dans
ce monde à l’envers
On
dit c’est la guerre
La
terre se désespère
Agissons
solidaires
Que
tous les luminaires
Nuit
et jour nous éclairent
Que
lire notre Voltaire
Et
ses pensées fédèrent
Dans
ce monde de travers
Qu’un
hiver littéraire
Ce
n’est pas une chimère
Que
ce Noël s’avère
Amour
à nos compères
2
Là
où je suis, je ne vois que des pieds qui marchent vite,
ralentissent, s'arrêtent et repartent d'un pas léger. La rue
piétonne est bondée.
C’est
presque Noël, les vitrines ont revêtu leurs costumes de fête. Les
haut-parleurs chantent invariablement Tino Rossi pendant que des
marrons chauds titillent mes narines.
L’odeur
attise ma mémoire. Mes pensées s’évadent jusqu’à ma
grand-mère assise
près
de la cheminée avec son panier remplit de châtaignes entre ses
cuisses. Elle les fendille une à une, les dépose dans sa vieille
poêle trouée et me confie ; « dès que t’entends une
douce ritournelle résonner à ton oreille, c’est qu’ta cuisson
est aboutie. Tes châtaignes doivent être grillées dehors et
tendres dedans.
- Recentre-toi, pas de mélo aujourd'hui, sinon t'es foutu !
- J'en étais où ?
Aux
douleurs qui me fragilisent, je sens la neige. Timidement, doucement
sans trop s'attarder, sans trop s'attacher, elle s’impose. Juste un
nuage blanc se dépose sur le macadam, s'efface puis réapparaît.
On ne l'a pas invitée mais elle sait qu'elle sera bien accueillie.
Les arbres à poil blanchissent pendant que les enfants à quatre
pattes rassemblent les quelques flocons qui jonchent le sol.
Moi
aussi, je l'aime cette neige car elle change mon horizon, me déguise
en esquimau et transforme mon parapluie en igloo.
- Qu'est-ce qu’il te prend ?
Je
suis un habitué de la rue Saint Vincent et m’installe au hasard,
selon ma fantaisie. Je déteste la routine. J’aime qu’on me
cherche. Car on m’attend avec mon nez rouge et ma phrase choc.
Chaque jour j’en trouve une, tantôt amusante, tantôt
philosophique, jamais triste…
Je
décoince le guindé, je distrais les mômes, je divertis la veuve,
je provoque le bourgeois, j’apitoie la bigote, je déride le
policier, je choque le curé, j’amuse l’anar et j’écris tout
ce que je vois…
Car
j’en imagine des histoires juste en espionnant des chaussures au
bonnet … j’en ai rempli des carnets écris au crayon gras. C’est
Madame Huguette du resto du cœur qui me les procure. Elle aime mes
mots qui disent des phrases et qui racontent. Elle n’a pas d’enfant
alors elle m’a promis qu’elle les ferait éditer pour les miens.
- Merde, merde et merde ! c’est Noël qui te fait pleurnicher …
Et
ces sapins qui clignotent, qui ravivent des couleurs de fête, des
bisous et des câlins oubliés.
- Non, mon vieux… tu l’as voulu cette liberté !
Ton
job, c’est clochard et heureux de l’être !
MONIQUE
LES
HOMMES DERIVENT EN HIVER
Les
hommes dérivent en hiver,
Les
relations deviennent de verre
Les
êtres frisent les fêlures
Les
couples frôlent les brisures
Les
croyants révèlent leurs cassures
Les
regards deviennent transparents
L’autre
s’évapore tel du givre
Les
hommes ont gelé leur façade
Pour
rester de marbre
Les
uns désertent les autres
Dans
un climat de froidure
Arbres
dépouillés
Feuilles
caduques ils ne savent plus vivre
Sur
la même branche
Les
médias stagnent en hiver
Amoncellement
des faits-divers
Lancés
en rafale de boules de neige
Engourdissant
les informations
En
stériles désinformations
Ere
de communication électronique
Mais
des langages verglacés
Qui
dérapent au premier virage
Les
religions ont les œillères de l'hiver
Les
cristaux coupants, sanglants cinglent
Les
prédications : des glaçons d'inhumaine froideur
Les
routes sont coupées, les Dieux ne savent plus se relier
Des
pays croulent sous des amas de combats
Guerres
en perpétuel hiver
Qui
cachent la partie financière de l’iceberg
Tous
ces peuples immigrés
Qui
dévalent en avalanche
Sur
des contrées dont le frimas
Les
contraint à l’hibernation du cœur
Jouant
sur un tapis de neige
Qui
s’émerveillerait
Qu’un
petit flocon
Par
dérision et compassion
Débaroulerait
la pente avec détermination
Se
transformant peu à peu
En
une grosse boule-terre qui pourchasse l’hiver.
VITALE
ESCAPADE D’UN RANDONNEUR EN TROUBLE D’HUMEUR
Par
la campagne,
il était parti,
S’échappant
de son lit.
Il
arpentait les chemins
D’un
égarement certain.
La
rivière qu’il entend
Coule
tranquillement
Alors
que ses pensées
Se
déversent
agitées,
Jaillissant
en cascades
Tumultueuses,
maussades,
Giclant
ses craintes.
Débordantes
complaintes
Violemment
rejetées,
Sans
cesse ressassées !
Elles
se heurtent aux pierres,
A
ses bornées œillères
Déposées
au fil des jours
Des
jamais, des toujours.
Il
errait, désespérément solitaire
Sur
cette peuplée terre
Qui
ne dévoilait qu’ombres
Et
gardait la pénombre
De
la nuit tombée.
La
végétation s’estompait,
Le
regard s’évaporait.
Le
paysage confus
N’était
que diffus.
Nuages
souffreteux de verdure
Pour
un projet immature
Voilant
la face
A
pile ou face
A
l’homme inquiet
Qui
nerveusement marchait
Sans
idée de parcours.
Les
pas incertains, lourds,
D’un
flandrin cherchant son chemin
Vers
un improbable destin
Assailli
de pourquoi !
Vers
qui, vers quoi ?
D’où
venait-il ? Qu’était-il ?
Où
allait-il ? Qui était-il ?
Personnage
fébrile
Il
savait tout de sa naissance,
Il
méconnaissait son essence,
Et
avait perdu le sens de sa vie
Depuis
des nuits.
COULEUR
BLAFARDE DE L’HIVER
Ils
ont emprunté à l'hiver la froideur du cœur.
Déjà,
la neige avait d'un voile, feutré les caricatures,
Engourdissant
l'expression dans un glacial futur.
Les
feuilles rougies de l'automne sont tombées,
Tourbillonnant
d'angoisses et de peurs,
Valsant
au rythme du sordide métal,
Concert
fourbe de percussions des armes qui sonnent le glas…
Déjà,
les oiseaux n'osent plus pépier en liberté !
Pâleur
des jours sous restriction…
Nuit
longue d'un obscurantisme…
Qu'un
croissant de lune n'éclaire même plus !
Il
s'avère que chaque hiver est chassé
Par
un printemps vengeur de vie.
Le
cycle est immuable, le temps des beaux jours viendra :
La
chaleur humaine fera fondre la terreur de l'hiver !
Les
fleurs ne seront jamais noircies de niqab
Mais
revendiqueront leurs couleurs bigarrées de tolérance.
Les
artistes feront voguer le drapeau de la liberté de penser.
Les
abeilles, librement, butineront des fleurs d'espèces différentes
Aux
cœurs desquels chacun puisera son essence de croyance.
LE
DERNIER HIVER
Déjà
l'hiver est là !
Le
vent entend le souffle du dernier râle
Murmurant
ses ultimes complaintes.
Ses
yeux éblouis tentent de retenir
Le
paysage givré qu'il a devant lui
Où
brillent ses derniers souvenirs.
C'est
si beau un paysage d'hiver !
La
pureté des blancs, le silence intense,
Le
ciel fardé de poudres irisées...
Jamais
il n'avait tant perçu les perles nacrées
Suintant
des neiges sous le soleil !
Lui,
n'est plus aussi vif que le froid !
Ses
membres tels des branches décharnées et rabougries
Laissent
le froid l'envahir et l'engourdir.
Ses
pas dans la neige dessinent les condoléances
Des
dernières empreintes de son existence.
Elles
s'effaceront dès les premiers beaux jours
Pour
laisser place au renouveau.
Bientôt,
les oiseaux pépieront piano
Pour
le laisser rêver en paix à son interminable hiver.
SYLVIE
S.
1
Papa,
il est allé à la gare de Lyon, chercher Pépé et Mémé. Quand ils
sont arrivés à la maison, ils sont restés longtemps dans le
garage, moi je voulais courir aller les voir, mais Maman a dit que je
me calme, que je les laisse arriver. Arriver ? Ils sont
arrivés ! puisqu'ils sont avec Papa dans le garage ! Je
les entends, je suis derrière la porte de l'escalier.
Enfin
ils montent, je veux les embrasser tous les deux en même temps. Les
joues de Mémé sont parfumées au « sent bon » du
dimanche et celles de Pépé ne piquent pas, elles sont toutes
douces, il a du se raser juste avant de prendre le train. Avec son
costume, sa chemise et sa cravate y ressemble au monsieur de la
banque que des fois Papa et Maman vont voir dans son bureau. Mémé
me serre contre elle, elle rit, dit que je suis toujours le plus beau
des petits garçons et que même j'ai drôlement grandi depuis qu'on
s'est vu pour les vacances. Elle passe sa main dans mes cheveux, que
Maman a mouillés pour qu'ils ne rebiquent pas, et les mets tout
n'importe comment. J'aime bien quand elle fait ça. Pépé lui me
chatouille et m'attrape dans ses bras pour parler dans mon oreille.
Il a un secret à me dire :
- Ce soir c'est décidé, j'attends le Père Noël, je lui prépare un casse croûte et on boira un canon ensemble !
-Avec le Père Noël ?! Tu crois qu'tu l'verras ? Maman a dit que si les enfants ne vont pas se coucher et que s'ils dorment pas, le Père Noël y va pas venir parce qu'il n'veut pas qu'on le voit.
- Ce soir c'est décidé, j'attends le Père Noël, je lui prépare un casse croûte et on boira un canon ensemble !
-Avec le Père Noël ?! Tu crois qu'tu l'verras ? Maman a dit que si les enfants ne vont pas se coucher et que s'ils dorment pas, le Père Noël y va pas venir parce qu'il n'veut pas qu'on le voit.
-Les
enfants...non, mais les Grands-père, c'est différents !
Je
regarde Pépé, les yeux tous ronds, je l'admire mon Pépé, il est
le plus fort, il n'a peur de rien , même pas de rencontrer le Père
Noël, le vrai, pas ceux déguisés des magasins.
Et
il l'a rencontré !! Au milieu des cadeaux déballés au pied du
sapin, il m'a tout raconté : Son arrivée en traîneau, sa
hotte un peu lourde, qu'il aime le saucisson, qu'il a bu qu'un seul
canon de rouge parce qu'il n'avait pas fini sa tournée, qu'il a dit
que je devais continuer d'être toujours sage et qu'il est parti en
remerciant Pépé du casse croûte en disant « à l'année
prochaine ! » … Ah ben là, j'suis trop fier !!
Aujourd'hui
… c'est moi le grand-père, je suis assis dans la cuisine chez mes
enfants, mon petit fils est dans son lit endormi, sur la table il y a
du saucisson, une bouteille de Mercurey et deux verres.
J'attends le Père Noël !!!
…..
2
Tout
est prêt !!
Ouf !
J'en peux plus de ces courses, j'ai beau avoir une charrette à
roulettes, j'ai toujours des tas de sacs à porter. Faut dire que
depuis deux jours je n'arrête pas. Tout doit être parfait. J'ai
commencé par ranger la maison, et j'ai enchaîné avec le ménage.
Gabrielle m'a téléphoné mardi soir pour me prévenir qu'elle
descendrait samedi, elle arrivera au train de 12h15. Je lui ai
préparé sa chambre, à ma petite fille, j'ai fait faire quelques
transformations depuis sa dernière visite. On n'avait rien changé
depuis le moment où elle est venue vivre avec moi , à la mort de
ses parents. A l'époque elle avait 9 ans, aujourd'hui elle en a 11
de plus, il était grand temps de moderniser tout ça et de lui faire
un espace qui cadre mieux avec les goûts d'une jeune étudiante
parisienne.
Les
doubles rideaux et le dessus de lit sont assortis à la peinture, un
camaïeu de beige et de taupe, c'est moi qui les aie faits ! Je
suis impatiente de voir son expression quand elle ouvrira la porte de
sa chambre. Elle va être ébahie, ma ptite'chérie. Je peux bien la
gâter, c'est mon rayon de soleil cette mignonne, je n'ai plus
qu'elle, puisque mon fils et ma belle-fille n'ont pas survécus à
cet horrible accident de voiture...Qu'est-ce que je serais devenue
sans cette enfant a élever, c'est elle qui m'a fait tenir debout,
c'est elle qui m'a fait avancer, qui m'a maintenue en vie.
Bon
allez, il faut que je m'remue, comme disait Raymond mon défunt, son
grand-père : « secoues toi ma fille !! ».
Je
n'ai plus que quelques heures pour lui préparer ses plats préférés :
Un
pâté aux pommes de terre, une pompe aux grattons, un lapin au vin
blanc et aux olives . Je vais lui faire une tarte aux poires
et... un cake au citron pour son petit déjeuner... dimanche. On va
se régaler, pour samedi soir j'ai prévu des escargots.... une folie
gastrique... mais tant pis, on aime trop ça toutes les deux !
On prendra du citrate de bétaïne ! Ah et puis on va se boire
une bouteille de champ'.
J'adore ces moments là, quand on a bu deux ou trois coupes, le soir,
assises côte à côte sur le canapé, on se laisse glisser dans un
bain chaud de confidences... quelques fois très intimes... on est
alors deux amies, deux complices, deux femmes...
C'est dommage qu'elle ne vienne que demain midi... elle aurait pu prendre le train de ce
soir.... elle a tellement envie d'aller à ce concert avec ses deux copines, je n'ai pas voulu
insister et puis c'est une salle mythique, Le Bataclan.....
Tout est prêt, je l'attends.
VALERIE
1
Scare
et Pécie se téléphonent.
- - allopécie, comment vas-tu ? Je ne pensais pas te trouver chez toi !
- - Escare ! Je suis ravie de t'entendre.
- - Je ne te dérange pas ?
- - Non, je couperose ; mon massif de rosacée est envahi par une sorte de lichen scléro-atrophique, Orgelet c'était l'année dernière, comme quoi dame nature !
- - A part ton jardinage, comment vas-tu ?
- - j'ai une balanite d'enfer, je papillonite, et puis j'ai décroché un cdd chez l'urtiquaire du coin, à moi commodes et armoires anciennes à vendre et à acheter. Enphétamine , m'a quelque peu pistonné, l'urtiquaire est un ami de son furoncle et de sa tante.
- - génial, tu as vraiment l'air d'être en forme ?
- - Tom m'a organisé un voyage surprise. D'abord les cataracte de bravoure pour lui car il n'est pas trop château, on a fait le choléra pour terminer par les fièvres de la vallée du Rift. Et gale à lui même ce Tom.
- - et toi, des nouvelles ?
- - Oh je suis comme un chancre mou. Dyshidrose ne t'a pas appelé ?
- - Shidrose, Non, je t'aurai prévenu.
- - Elle m'a quitté hier. Elle m'a pris en grippe depuis un mois. La peste, elle a toujours fait preuve de septicémie à mon égard. Je me suis pris une folliculite cette nuit, j'ai encore une sacrée barre.
- - Quoi ? Mais tu étais sa coqueluche ?
- - La teigne ! Méla et noemie n'ont rien pu faire. Elle est partie habiter dans la zona son frère.
- - la zone de son frère, Scare, ton français ! Passe à la maison, je vais te préparer une bonne petite pelade avec un bon verre de rosé.
- - mais quel herpes de salope elle fait, tu te rends compte !
- - Scarelatina, elle ne te plairait pas ?
- - Celle qui a appris la sténose et la dactylo chez ton père ?
- - Oui, on avait pas encore d'appareil lacrymal mais ce n'est pas le sujet.
- - elle a eu son eczema au fait ?
- - Scare, tu évites le sujet ?
- - Pécie, je suis sûr que tumeur de soif, je vais te laisser.
- - Réfléchis quand même, pour Tina, tu pourrais te mettre sur la liste des candidoses.
- - le mal d'amour, ça gangrène tout, alors…
- - mouai, siphylisse m'appelle, c'est la sœur de Tina, je lui parlerai de toi. Allez, prépare toi un bon ebola de chocolat, ça va te remonter. Et filariose faire des courses, ça te changera les idées.
- - non, au lit pour moi, je me sens un peu fébrile, à demain, on se trombidiose en fin de journée.
-
2
L'homme à peur , il
chancelle, il est terrorisé,
là,
seul et voûté, il se cramponne au panneau,
piégé
par la glace, mon dieu que cet être est beau,
égaré,
pris tel l'oiseau, perdu sur cette place,
l'air
hagard, paniqué, tête légèrement penchée,
la
dure terre blanche a gelé, il ne peut marcher,
il
sent que bientôt il va glisser, chuter.
Nos
regards se croisent, le sien azur éclatant,
étincelant,
et puis c'est délicatement,
que
je lui tends mon bras et qu'il m’emboîte le pas
d'un
air décidé, en route pour la traversée,
il
est si léger malgré le poids des années.
Je
me penche vers lui pour lire les marques du temps,
ce
tremblement menaçant, son écharpe rouge sang,
sa
peau si boucanée, halée, tannée, séchée,
tous
ces profonds sillons qui parcourent son visage;
sa
tenue noire soignée, il ressemble à un mage.
Il
marche avec courage malgré son très grand age,
ses
cheveux enneigés, ses lèvres ciselées,
ses
douces mains raffinées, son joli béret,
pas
à pas il avance, lentement, doucement,
un
air malicieux, rusé rend l'homme si charmant,
la
traversée prend fin, l'homme me lâche peu à peu;
d'un
regard affectueux, nous nous disons adieu.
3
Histoire
d'une vie
Les
mots en caractère gras sont des titres de romans
Grandir,
c'est le
temps de
grandes espérances, les vrais bonheurs, le pays sans adultes, le
temps des secrets, l'art de l'oisiveté, la volupté d’être. Puis
viennent la
métamorphose, l'éveil de l'intelligence, les transformations
silencieuses sans
oublier la
politique du rebelle.
Soudain,
j'ai l'esprit nomade: objectif paris, un long chemin vers la liberté
Je suis
l'homme qui voulait changer le monde, et
j'ai le
goût du risque, je
me prends pour le
visionnaire ! Alors,
c'est le
premier amour, ma première femme, une vraie parisienne.
Et
très vite
, le formidable événement: un enfant, elle s'appelait Sarah, sage
comme une image ! Je
suis un
père idéal et
le plus heureux des hommes, ma vie est tout a fait fascinante
Nous
sommes la
famille modèle, rien ne vaut la douceur du foyer
Tout
à coup,
l'intranquille: l'enfer commence avec elle, erreur fatale, la
sottise, c'est arrivé comme ca, sans raison. C'est
le palais
du désir,
j'ai le
diable aux corps, deux femmes, double jeu. Je
suis le roi
des mensonges, d'un millier de mensonges. C'est
folie dans la famille, l'impossible pardon.
La
famille en désordre: cinquante ans passés, présent et avenir,
l'heure trouble.
Je
suis au
bout du rouleau, divorce a Buda, la bataille, chute libre, descente
aux enfers, on ne peut compter sur personne. C'est
l'isolation,
l'hiver de la grande solitude et
la pension alimentaire, le déménagement.
Quand
reviendras tu ? J'ai
un cœur
trop lourd, je
vis dans le
jardin des larmes, sans famille.
Et
si je me confessais,
je commence
la thérapie, non
le passé
ne meurt jamais.
Vingt
ans après:
Je veux de
la vérité et
joue cartes
sur table, transparence. Par
un soleil
d'octobre,
je pars vers
la mer, vers le sud.
direction
la
grande île. Voici
le temps
retrouvé, le second souffle: une vie comme neuve, me
voici l'homme
qui rit, le retour du bonheur, chouette une ride !
Dernière
escale: Un si long voyage dans
le jardin
du passé.
Tout
compte fait, Je
reviens à
Paris ma bonne ville, jours tranquilles à Clichy; j'ai rêvé de
courir longtemps mais
c'est la
dernière porte. Puis je vous dire un secret ? tout ce que je sais
c'est que je ne sais rien .
Je
suis au
terme du voyage, près
de la mort
porte de la vie, ne t’inquiète pas pour moi, tendre est la nuit.
FREDERIC
I
vert
L’hiver
nous est tombé dessus ; ouille !
Les
arbres ont perdu leurs feuilles rouille.
Les
frimas sont là ; aglagla
L’église
égrène ses heures tristes, ah glas, glas…
La
lumière légère ne pèse que d’un poids chiche,
Dans
le ciel, le soleil, gros comme un pois chiche,
Tente
de darder ses rayons vers
La
terre comme au pôle le rayon vert.
C’en
est fait de la longueur de ces jours
Où
l’on fit avec bonheur deux séjours
Sous
des cieux éternellement cléments
Dont
celui qui dit avoir la clef ment.
Mais
courage après l’hiver vient le printemps
Nous
retrouverons la joie en empruntant
Les
chemins battus par la gent féminine
Des
vers et de la prose élite,
Auprès
de leur mâle prosélyte.
Pour
ranger ses livres
Il
voulait s’en aller faire du ski
Inhaler
des sommets l’air exquis
Il
mit sur sa voiture des pneus cloutés
Et
partit dans un brouillard flouté
Là
bas vers les pics nivaux
Sur
l’autoroute sans passages à niveau.
Mais
en arrivant, quelle déception,
Toutes
les pentes, sans exception
Etaient
dépourvues de poudreuse,
Pierreuses,
ocreuses, cendreuses.
C’était
la faute au réchauffement climatique,
Tout
à fait symptomatique.
Comme
il s’était fourvoyé,
Il
s’en revint dans ses foyers
Fort
déçu, tout dépité,
Il
pensa avec sérénité
Que
vais-je faire de mes skis ?
Chez
lui, en buvant un whisky,
Il
se demanda « dans quel état j’erre » ?
Et il en fit des étagères.
SUR
ONZE PIEDS
C’est
lili, c’est lili, c’est l’hiver maintenant,
C’est
le G, c’est le G, le gel permanent.
Et
y’en a, et y’en, y’en a pour longtemps
C’est
pas gai, c’est pas gai, tout ce foutu temps.
Dis
c’est quand, dis c’est quand qu’il fera soleil
Qu’on
aura, qu’on aura, bien chaud aux oreilles.
Dans
des mois, dans des mois, dans des mois c’est sûr,
Y’aura
plus, y’aura plus, y’aura plus d’gerçures.
Mais
il faut, mais il faut, mais il faut attendre,
Le
prinprin, le printemps, le printemps si tendre.
D’ici
là, d’ici là, d’ici là y’a qu’à,
Boire
un coup, boire un coup, boire un coup d’vodka.
C’est
bien mieux, c’est bien mieux, c’est bien mieux qu’un grog,
C’est
si bon, c’est si bon, on dirait d’la drogue.
Ca
rend sou, ça rend sou, ça rend soulographe,
On
bébé, on bégaie comme un phonographe.
C’est
poupou, c’est pour ça, qu’on attend l’printemps
Qui
renren, qui renren, qui rend repentant.
Les
bobo, les beaux jours, qui vont revenir,
Vont
nous a, vont nous a, vont nous assainir.
Y
s’rait temps, y s’rait temps, car ma poésie,
Pleine
de fan, pleine de fan, pleine de fantaisie.
Est
au bout, est au bout, au bout du rouleau,
C’est
pas du, c’est pas du, c’est pas du boulot…
La dictée du Stylo d'Or: Texte de Frédéric Fossaert inspiré de « La confession d’un enfant du siècle » D’Alfred de Musset
Le
désenchantement
Nous
convînmes de ne plus nous revoir, de crainte que vous ne fussiez
offusquée et que nos relations prissent un tour tyrannique.
Néanmoins,
je me prenais à rêver à ces temps où, jeune sybarite, je
m’imaginais caracolant ardemment vers vous sur une haquenée allant
l’amble ; de la race de celles que j’avais vues jadis musant
en troupeau dans des champs de bruyère et de trèfle incarnats.
J’entends
encore tintinnabuler les verres que nous entrechoquions, tandis que
j’étais l’amphitryon de vos fêtes anodines où nous nous
gaussions en abusant de surnoms hypocoristiques. J’étais Apis et
vous la taure promise au rite extatique, du moins était-ce là ce
qui surnageait du maelström de mes sentiments ambigus.
Les
louanges de vous que j’avais entendues me berçaient de l’idée
incongrue que vous eussiez pu être celle qui partagerait mon
eudémonisme quiétiste. Et alors que vous me laissiez m’abandonner
aux mille ridicules de l’amoureux transi, j’ignorais que vous en
fussiez l’observatrice goguenarde. Je ne réalisais pas que mes
élans brouillons mais sincères se brisaient sur les récifs cruels
de votre indifférence moqueuse.
C’en
est fait de mes idéaux de nigaud, votre attitude sinueuse m’a
dessillé. Vous prîtes le parti d’en rire, tandis que je ravalais
mes larmes, vous vous esclaffâtes quand je sanglotais…
Désormais,
mon cœur néantisé n’appelle plus pour moi, de ses vœux
désenchantés, que la vie érémitique de l’anachorète au désert.
A lire, le beau texte d'Alyx, de l'Atelier d'écriture...
Octobre 2015
L' Eté des Poètes Juin 2015
Adrienne
Cauchemar
Une
fumée incarnadine rugit hors de l'obsidienne à l'éclat souillé et
s'entortilla autour du fut malingre d'un baobab gigantesque croulant
sous une horde de morts hallucinés et armés de crocs aux relents
d'ammoniac frelaté. L'aube gémissait. Le vrombissement endiablé
surgi des élytres de milliers d'eumolpes brisa le dais marbré du
ciel qui se répandit en larmes de lymphe pustuleuse et olivâtre.
Des droséras anémophiles et digressives s'élevèrent en claquant
du bec, tirant dans leur sillage une vague de ptérodactyles amorphes
agitant frénétiquement des moignons d'ailes. L'hellébore fétide
hésita au bord du monde, arracha ses racines émétiques et remplies
de sagesse puis se décida à accoucher du tripode aux pieds de feu
puant le carbone mithridatisé qui la déchirait depuis des
millénaires à coup de trilles assassines et ultrasoniques. Soudain
l'appel tonitruant et feutré des cloches adamantines du pur sang à
la croupe couverte d'arabesques mauresques troua le décor. La bulle
de savon s'éleva. L'aiguille du géant lilliputien parée de sa
dentelure de sang vert trancha la bulle. Pop ! Noir, noir, noir !
Tête dans le bocal. Chacal au regard de percale ! Rien. Bancal.
Eumolpe :
insecte coléoptère. Ravage la vigne. Peut être synonyme de
"écrivain".
Droséra :
Plante carnivore vivant dans les tourbières.
Digressif :
qui fait des digressions (développement qui s'écarte du sujet
principal).
Anémophile :
plantes dont les fleurs se prêtent à l'entraînement du pollen par
le vent.
Emétique :
qui provoque le vomissement.
Mithridatisé :
rendu insensible, indifférent (figuré).
INSOMNIE
Tourbillons
froids de l’enfer
Énormes
et noirs.
Cruelles
chimères,
Azazel
ou Lucifer !
Quel
sinistre entonnoir
Les
crache et les agglomère.
Sommeil
refusé, vertige
Nausée,
ivresse abhorrée
Temps
qui se fige
Nuit
haïe et espérée
Devenue
lointaine déesse
Ou
proche diablesse.
La
fureur de la lutte
De
la harpie avec Belzébuth
Dévore
minute par minute
La
nuit démolie et sans but.
Démons
triomphants et anges anéantis
Appellent
ensemble la folie.
Le
repos s’échappe
Par
une éternelle trappe.
Rage
vaine et sans soupape.
Désespoir,
fatigue, pleur,
Frayeur,
peur, malheur,
Terreur,
douleur.
Géhenne
harassante et sans fin
Crachant
l’angoisse de jours sombres.
Où
est le beau et divin séraphin
Triomphant
de la cohorte des Ombres ?
Où
est l’archange salvateur
Qui
balaiera l'agrypnie du veilleur ?
La
Peur
Martin
suivait ce couloir depuis bien trop longtemps. Pourquoi avait-il
suivi cette femme aux cheveux couleur de carotte dans ce bâtiment
qui menaçait ruine ? A cause de son parfum entêtant ? De
sa démarche légère ? Il ne savait plus trop. Il s'était
simplement conduit comme un idiot.
Il
cherchait maintenant à regagner l'extérieur et son ambiance
colorée, chaude du soleil de l'été. Ici, régnait une fraîcheur
qu'il trouvait de plus en plus malsaine et la pénombre semblait
s'épaissir au fur-et-à-mesure qu'il s'éternisait entre ces murs
lépreux.
Loin
devant lui, une porte claqua. Fort. Malgré lui, il sursauta et une
onde froide lui parcourut l'échine. La paume de ses mains devint
moite. Martin respira un grand coup. Il accéléra son allure. A sa
droite, se dessina une porte. Elle était entrouverte. Derrière un
nouveau couloir. Pris d'une inspiration subite, il décida de s'y
engager. Ici, les murs suintaient. Quelque part, des gouttes d'eau
s'égrenaient en un son métallique. Puis, un bruit de talons hauts
éclata. Une femme, la femme devait être tout près. Très près.
Martin se mit à courir. Il lui fallait la rejoindre. Elle devait
savoir retrouver la sortie. Le couloir fit soudain un coude sur la
gauche, à angle droit. Là-bas, à l'autre extrémité, il perçut
un mouvement fantomatique. Martin sentit son cœur s'emballer. De
nouveau, sa respiration se fit hachée et il se couvrit d'une sueur
glacée. Il tenta de se raisonner, de reprendre son souffle mais
l'adrénaline qui l'avait envahi ne semblait pas de cet avis.
Il
écarquillait les yeux, peu sûr de ce qu'il voyait se profiler au
fond du corridor qui n'en finissait plus. Un personnage aux traits
hagards se dessinait face à lui. Enfin ! Enfin quelqu'un !
Quelqu'un à qui demander son chemin.
Il
se précipita encore plus vite vers l'avant et percuta de tout son
poids une surface lisse et sale. Choqué, il dévisageait l'inconnu
qui se dressait devant lui. Un homme hirsute aux yeux exorbités
plongeait ses yeux dans les siens. Sa bouche, grande ouverte, était
tordue par un rictus hideux. A travers le voile qui les séparait, la
pâleur de l'individu était frappante. Il semblait vidé de tout
sang. Gris, il était gris. Des larmes de sueur tremblaient sur ses
joues glabres. Martin tendit les mains, son vis-à-vis mima son geste
à la perfection.
Alors,
il comprit. Son reflet le toisait. Son cœur s'enfla encore et
envahit toute sa poitrine. Sous ses coups redoublés, il étouffait.
La salive qu'il n'arrivait plus à avaler se mit à couler hors de sa
bouche qu'il gardait désespérément ouverte. Derrière lui, un
hurlement déchira le silence. Un crissement. Brutal. Menaçant. Une
ombre, deux ombres… juste dans son dos. Il les voyait s'agiter dans
le miroir. Cette fois, il sentit un cri monter et se ruer hors de sa
poitrine. Et tandis qu'il hurlait en regardant le petit groupe qui
s'avançait vers lui, Martin sentit une onde chaude et liquide
inonder son pantalon. Sa vessie venait de le trahir. Ses jambes
plièrent et il s'affaissa.
Le
bloc de papier
Blanc,
format A4, triste et moche. Il avait eu une couverture, blanche,
triste et moche ! Elle avait disparu un jour. Lequel ? Je ne me
souvenais plus. Il était posé là, sur un coin de mon bureau blanc,
triste et moche mais tout de même pas de format A4. Quoique ! Ce
bureau que je trimbalais depuis mon enfance n'était pas immense. Sa
surface à vue de nez : douze fois celle de mon vieux bloc de papier.
Depuis quand traînait-il sur un coin de ce meuble exigu ? Je n'en
avais aucun souvenir. Quand l'avais-je acheté ? Au fait, était-ce
bien moi qui en avais fait l'acquisition ? Sans doute. Tout ce que je
savais, c'est qu'il était là depuis longtemps. Les coins inférieurs
de ses pages se recroquevillaient, s'enroulaient vers le haut,
tirebouchonnaient à qui mieux mieux. Au fil du temps, ils se
désagrégeaient. D'ailleurs, la première page, elle aussi,
subissait l'outrage du temps. Elle était devenue pelucheuse. L'usure
la faisait se transformer doucement en une surface irrégulière d'où
s'échappaient d'infimes parcelles de papier. Il gisait tantôt à
découvert, tantôt noyé sous une marée de factures, de prospectus
publicitaires et autres journaux. Il réapparaissait de temps à
autre comme pour me narguer. Il me rappelait de façon intermittente
qu'il était arrivé ici suite à l'idée absurde que j'avais eu
d'écrire. Idée irrationnelle s'il en fût ! A l'école, j'avais
toujours été nul en composition française et on ne pouvait pas
dire que je passais ma vie dans les bouquins.
Aujourd'hui,
alors que j'étais assis pour je ne sais plus quelle raison devant
mon bureau, il était là, bien en évidence. Il avait refait surface
après quelques semaines de plongée sous-papiers. Je ne me souvenais
pas de l'avoir extirpé de la masse sans cesse croissante des
documents divers et variés qui s'amoncelaient là. Je passais ma
main sur sa surface. Son aspect feutré se retrouvait dans la
sensation que j'éprouvais lors de cette caresse. Ce simple geste
produisit le soulèvement d'une fine poussière blanche dont une
partie resta collée à l'intérieur de ma main. Machinalement, je
retroussais ses pages. Si, sur la première d'entre elles, le tracé
de son quadrillage n'était plus guère visible, à l'intérieur, ses
traits nets dessinaient un ensemble de petits carreaux sagement
serrés en bon ordre les uns contre les autres. Ils semblaient
agressifs à mes yeux habitués à leurs comparses décolorés. Je
refermais le bloc et tentais de lisser les coins qui rebiquaient.
Peine perdue. Mes doigts remontèrent alors vers les agrafes qui
liaient les pages entre elles. Avec l'ongle d'un index, je grattais
le résidu de couverture resté coincé sous elles. Après plusieurs
minutes de labeur, je réussis à en détacher les derniers lambeaux.
Mon
ouvrage minutieux terminé, je fixais toujours le bloc blanc, triste
et moche. Comment avais-je pu penser qu'il était facile d'écrire
sur ce type de papier blanc, triste et moche ? Découragé, je
détournais mon regard. J'accrochais des yeux mon reflet incrusté
dans le miroir rococo dont une bonne moitié sortait de derrière le
vieux fauteuil affaissé non loin de ma chaise. Je contemplais alors
le visage d'un homme blanc, triste et moche que les ans avaient
durement brutalisé. Mécaniquement, d'une main j'ouvris le tiroir de
mon dérisoire bureau. Elle se referma sur le petit automatique qui y
sommeillait.
Rouge.
Le bloc rutila gaiment et but avidement le sang rouge qui était venu
l'éclabousser.
Alyx
Si proches
Quelle
chance nous avons d’être contemporains !
Rends
–toi compte, nous aurions pu ne jamais nous croiser
Vivre
les mêmes jours, baigner dans la même culture,
Vibrer
aux mêmes films, boire les mêmes musiques,
Craindre
les mêmes événements mais être heureux des mêmes progrès,
Nous
sommes si différents … et si proches.
Quelle
chance nous avons de vivre la même ville !
Rends-toi
compte, nous aurions pu ne jamais nous rencontrer
Longer
les mêmes rues, flâner dans les mêmes jardins
Connaître
les mêmes boutiques, applaudir aux mêmes scènes,
Nous
bercer des mêmes reconnaissances familières
Nous
sommes si différents… et si proches.
Quelle
chance nous avons d’aimer tous deux l’écriture !
Rends-toi
compte, nous aurions pu ne jamais nous parler
Regarder
aux mêmes fenêtres, faire les mêmes voyages
Nous
émerveiller sans cesse des phrases et des mots
De
la Beauté et de la Vie qu’ils portent au cœur,
Nous
sommes si différents … et si proches
Cascade.
La
roche garde la mémoire millionnaire de sa naissance
La
roche garde la mémoire de son histoire, de tous les vents et toutes
les eaux
La
roche a gardé ce soir la chaleur sensuelle du soleil d’aujourd’hui
La
roche vient de garder la trace humide de mon pied nu
La
roche m’accueille pour quelques instants dans son infini.
Elle
reste
Et
je ne fais que passer.
Simples éléments d’un
printemps en Corse
EAU
La
cascade tambourine, m’aveuglant, m’enivrant
Je
reçois sa force fraîche qui lui vient des sommets.
Mon
crâne ne raisonne plus, il ne fait que sentir.
CRÊTES
Les aiguilles de Bavella
découpent le ciel,
Haute
dentelle fine toujours renouvelée,
L’ombre
et la lumière brodant la roche et les arbres.
MER
L’écume
est douce aux pieds et le spectacle immense
Depuis
la jolie transparence des bords de plage
Jusqu’aux
profondeurs mystérieuses et inquiétantes.
CÔTES
Les
strates blanches avancent en haute majesté
Portant
au ciel les maisons de Bonifacio
Et
le porphyre se couche sous la caresse des vents.
ÎLES
Les
rochers en chaos révèlent au creux des vagues
Les
plages qui blondissent sous le soleil levant
Les
oiseaux nous invitent dans leur paradis
CHANTS
Les
voix montent en polyphonies douces et viriles
Livrant
un peu des villages aux senteurs de myrte,
De
leur vie, leurs amours et leurs ardents combats.
FEU
Le soleil sur mon corps
s’est permis tous les coups
J’ai
le visage en flamme, et la peau qui me cuit,
Le
vin de Corse aussi m’embrase le cœur et l’âme.
AIR
La
douce tiédeur du soir libère dans le jardin
Des
parfums inconnus d’essences tropicales
Qui
portent loin nos rêves et préparent au sommeil.
Ces
mots d’une syllabe portent les sens en tous sens
Ils
viennent de la Corse en vaisseaux bien chargés,
Il
eût fallu pour chacun un chapitre au moins.
Ecrirêve
La
promenade fut facile, la montagne était basse.
Déjà
le soleil couchait les ombres sur la campagne.
Entre
loup et chien, l’écho ne hurlait plus, il ne faisait qu’aboyer.
L’horizon
bétonnait, la ville approchait donc,
avec
ses résidences si denses,
avec
ses chiens attachés,
avec
ses chemins quadrillés,
avec
son bataillon d’organisation et d’ordr’inateurs.
Cascarède
eut peur que la raison arraisonne ses vaisseaux de grand large
pour
les rentrer au port.
Il
prit une déviante pour ne pas arriver trop vite,
et
l’âme agie opéra : il emprunta une cursive.
Il
se mit à écrirêver, suivit les volutes, les boucles et les arches
de
son écriture courante et fantaisiste
qui
conduit la pensée déroulante et déroutante,
sans
rime ni raison, sans frime ni direction.
Il
tourna la clé des champs et libéra les herbes folles.
La
folie était son pays sage.
Il
découpa le ciel pour se faire un abri à sa démesure,
en
dents de scies pour croquer les importuns.
Puis
il se coucha. Il se coucha dans le temps,
parce
que Léo avait dit « avec le temps va, tout s’en va ».
Tout
s’en va même la raie alitée.
Il ne croyait plus
en sa pèche.
Dans
sa couche, il ne voulait plus voir la dure taie de la raie alitée.
Les
jeux de mots ne sont qu’un passage pour mieux décoller.
Il voulait de
l’absurde, du vrai absurde qui met le cul par-dessus tête.
Il se coucha donc le
cul sur la tête et ainsi tourne-emboulé,
il vit son for
intérieur.
Son
for était sombre comme de bien entendu.
Il
y avait rangé ses souvenirs, ses émotions :
Il y avait l’armoire
à colères : fallait pas l’ouvrir, pas jouer de lyre à
cibles,
ça
fait mal aux autres quand on les cible.
Il y avait le tiroir
à chagrins : fallait le maintenir bien fermé, ça fait mal à
soi-même.
Il
y avait les projets indicibles, les moqueries acerbes, les
agacements,
les
préférences, la fierté déplacée, l’amour impossible…
bref
tout ce qu’on ne peut partager qu’avec soi-même
et
comme il n’était pas égoïste, il quitta son for intérieur.
Il
interrompit l’arrêt alité qui par ce canal lui revenait.
Il
se leva, la tête dans les étoiles, évita les dents de scies de son
abri,
c’est
pas bon pour le moral : ça fait des hauts et débat.
Et
comment débattre quand on est seul ?
Il
se tint debout face à la nuit.
Il
se confronta à ses propres idées,
sortit
ses propres arguments de leur fourreau de certitude,
sabre
au clair de lune, plume au vent des idées fixes
et
là, il rejoignit l’absurde du solipsisme :
Il
tournait en rond, dans son monde.
Sans
foi, sur le guêpier, il remettait son ouvrage,
Mais
les mots étaient lourds dans des phrases piégées.
Evoquer ce qui
vient, convoquer ce qu’on peut,
invoquer les cieux
pour s’envoler jusqu’à eux.
Il
n’atteignait que les nuages.
Son
écrirêve était nébuleux,
en
strates cumulées dignes d’un Nimbus
sans
rythme ni passion, il retombait en pluie.
Les
autres… il avait besoin des autres.
Il
prit alors la route de la ville,
pour
se frotter au monde et s’ouvrir l’esprit,
se
trouver des compagnons et les admirer :
ceux
qui colorient sur tous les tons
ceux
qui emmènent sur tous les sons
ceux
qui donnent de l’âme au béton
ceux
qui sur les planches enchantent les soirées…
La
contrainte pour finir n’est pas mauvaise fille.
Sans
être canalisée, la pensée se perd en marécage,
Il
faut pour lui donner du flux de solides rivages.
Déjà,
sur le chemin, Cascarède sentit l’énergie revenir
Comme
un papillon, il fonça vers les lumières de la ville.
Caroline
Number 1 :
Iris buvait en son calice
Un vin fou riche en épices
Qu’une goutte de
maléfice
Vint en son ciel faire
malice.
Sans que vraiment rien
elle n’y puisse
Elle ressentit sur sa
cuisse
Comme une sorte de petit
suisse
Tombé à l’instar d’un
vieux truisse.
Sortant tranchants à sa
guise
Elle souffla plus fort que
la bise
Et sur son excroissance
exquise
Elle abattit la lame grise
Couchée sur le bord de
son flanc,
Elle suça le laitage
blanc
Qui mêlé aux perles de
sang
Goûtait les berlingots
d’antan.
Number 2 :
Une agapanthe sur la
mauvaise pente
Affirmait à un vieux
cerisier
Qu’une ancolie sans
mélancolie
Ne valait rien sans un
brin de folie
Et qu’à vouloir
toujours tout maitrisé
Nul ne l’appellerait un
jour l’amarante.
De son côté un gros
rhododendron
Très lourd sous son
feuillage rond
Débitait à un fier
hélianthème
Plutôt fort en thème
Un charabia passiflore
Mais très osé sur
l’hellébore.
Devant tant de
grivoiserie,
rougit l’innocente
capucine
Qui dans sa tenue
d’opaline
Tourna les yeux vers son
amie,
La renoncule à frou-frou
Qui aussitôt la jeta dans
la gueule-de-loup
Pleine de rage, la
saxifrage
Extirpa de cette bouche
vipérine
Le jeune fille et l’autre
orchis fine
Qui sans l’aide de la
dextre renouée
Eurent été conduits sans
ambages
Jusqu’aux limites du
rivage.
Admirez ce florissant
jardin paysager
Où coexistent les humeurs
les plus humaines
De la langueur à la
convoitise
De la rage à la couardise
Tout ce qui fait en cette
fausse stance
la beauté de ce massif en
transe.
Number 3 :
Sur une île de l’océan
pacifique vivait Hippolyte, un jeune provençal polyglotte, qui pour
satisfaire ses penchants érémitiques, avait dans la roche
granitique troué sa demeure troglodyte.
Ne dites à personne,
surtout quand le téléphone sonne que notre bienheureux, vit là-bas
dans une grotte tout juste assez haute pour pouvoir installer sa
hotte.
Car de la visite, il n’en
veut point avoir, préférant de beaucoup le lancinant roulis des
flots à la conversation incessante de ses aïeux.
La journée il peint des
mammouths ou des chevaux sauvages sur les parois de sa cuisine à
colombage. Il utilise de la poudre de lilly-pillys ou d’eucalyptus
en guise de pigments colorés.
D’ailleurs lui-même
qui passe le plus clair de son temps dans son antre sans lumière se
sent peu à peu se faner et perdre l’éclat de sa couleur
d‘autrefois.
D’un tempérament
plutôt roux à peau blanche, il est en passe de devenir, comment
dire, transparent voire translucide.
Même les contours de son
visage ont changé ce qui lui fait dire à lui-même et à haute voix
qu’il est transfiguré. Plus grave encore, il commence à avoir
quelque doute sur son genre et se sent irrésistiblement attiré par
la transsexualité.
D’ailleurs le koala qui
cohabite avec lui aurait fort à raconter s’il avait suffisamment
d’énergie pour le faire et surtout si on lui donnait un micro
adapté.
Ce transfuge transplanté,
translucide et transfiguré devient naturellement transsexuel.
Parfaitement lucide sur
son état, pouvant en mesurer l’évolution tous les matins devant
le miroir de sa salle de bain, il se grime une fausse barbe rousse
sur le menton tout en s’interrogeant fortement sur la façon de
remédier à cette auto disparition.
Certes se réinventer un
visage tous les matins à la craie noire en pensant qu’elle est
rouge est une possibilité mais qui ne peut être que provisoire.
En plus de la dissipation
progressive de ses traits il avait dû faire face à la perte
irrémédiable de ses cheveux qui l’avait conduit à cette terrible
extrémité : confectionner un tissu de peaux de bananes cousues
qu’il devait régulièrement remplacer afin de garder le jaune
citron de la peau le plus proche selon lui de la couleur carotte de
sa chevelure d’antan.
Ces perruques bananières
et pourrissantes amassées dans un coin de son habitat commençaient
à empester et Hippolyte obligé d’ingurgiter une quantité
pharamineuse de ce fruit oblong régressait de jours en jours à
l’état de singe.
Tant et si bien qu’une
pilosité longue et rêche finit par se fixer vaguement sur le
contour de sa silhouette évanescente et il devint en quelques
semaines une simple couverture de poils.
Il se traînait dans la
maison comme une serpillère mal lavée et lorsque sur ces 2 pattes
il se redressait les bras écartés, il ressemblait à une chauve
souris dépliant ses ailes velues.
A la puanteur des bananes
en décomposition s’ajouta vite un désagréable remugle qui
émanait de lui-même et qu’Hippolyte mit longtemps à identifier.
C’est son compagnon le
koala qui, de façon tout à fait fortuite, lui révéla les raisons
de son malaise, lorsqu’un jour de tempête, il quitta la maison
sans fermer la porte.
Hippolyte s’approcha du
seuil et huma les relents venues de l’océan et portés par le vent
déchaîné. Puis, il se retourna et fit quelques pas à l’intérieur
de la pièce ce qui lui permit enfin de mettre un nom sur son
exhalaison.
Il sentait le renfermé.
Ce fut comme une
révélation pour lui. En trouvant le bon mot, il trouvait la
solution à tous ses maux.
Il courut vers la plage,
sautant de joie, dansant sur le sable tandis qu’un à un tous ses
poils s’envolaient dans le souffle puissant.
Il tournoya pendant des
heures comme s’il passait dans le tambour d’une machine à laver.
C’est alors que le
soleil réapparut sur une mer enfin calmée.
Essoufflé mais heureux,
Hippolyte s’approcha de l’eau et put enfin revoir son reflet dans
les vagues apaisées. Il reconnut ses yeux, son front, sa bouche, sa
tignasse colorée et tout ce qui faisait de lui l’être qu’il
était.
Il sourit et
tranquillement regarda son ami le koala.
Il le mit sur son dos
tandis qu’au loin les sirènes d’un cargo en partance
retentissaient.
Il agita les mains et se
mit à appeler pour qu’au plus tôt on vienne le rechercher.
Dominique
Mariage
en Absurdie
C’est
enfin jour de Grande Lessive
le
bal des pingouins hilares s’élance
en
lissant leur humeur mouillée
sur
les prés vannés que tordent
de
rires obsolètes les hologrammes
feutrés
mais néanmoins populaires.
Réminiscences
de cristaux bavards
destinées
aux prétentions féroces
d’
analphabètes ventripotents.
Même
si le Grand Veneur
n’est
pas à la noce il s’accroche
à
l’immensité en dégustant son cri lustré
et
la Sainte Trinité badine
sur
le bec bien huilé de mille igloos fragiles.
On
est déjà à mi-aout.
L’escadrille
amarante exulte inexorablement
Chagall
botte en touche
et
c’est d’une belle oie blanche
qu’il
glisse parmi nous.
Il
en fait tout un cirque
chat
piteux s’il en est.
Mais
la montagne est belle
les
mots clament à tire d’aile
tandis
que l’horizon enchante le néon.
Où
sont donc passés les enfants d’Edouard ?
C’est
le temps de la célébration
le
vaisseau du futur absorbe les mariés
sous
les joyeux graffitis en queue de pie.
La
cérémonie enjambe les corridors
le
fluide spatial s’engouffre entre les toiles.
Les
points de suspension ne tenant qu'à un fil
les
fautes d'ortolan s'y agrafent graciles
les
Inuits inutiles effeuillent le papier blanc
glacé
de la banquise
font
publier les bans
l'encre
bleue est exquise.
Les
curistes curieux n'en ont cure
et
dégomment l'astrolabe hasardeux.
Grenade
enchantée
La
grenade écarlate éclate d'un rire charmant
S'étale
sous les lattes du ténébreux aimant
Dégoupille
le té de son cri arbouté
Il
ne reste qu'un nébreu au sort des plus curieux
Attiré
sous les ifs par l'amour explosif
D'une
silhouette en paille qui s'enflamme et se taille
Un
chemin au soleil la rejoint à tire d'elle
En
fume un sort ses runes et se rit de la lune
Le
grenadier est fier de sa graine guerrière.
Songe
de Galice en Dalilée
Les
lisses dauphins si lestes jaillissent des jonquilles
Et
sur la jonque céleste la dorade écarquille
Un
lagon médusé au long songe éthéré
C'est
à l'or que Galice à l'orée d'un calice
Palisse
les oranges qui de leur pelure frangent
Le
radeau de Vénus et se branchent à Janus
Un
spectre sidéral effleure le soleil
Mensonge
vespéral d' une vapeur de vermeille
L'
esquille de glace pure s'allonge près des mésanges
En
légères coques de bure brillant de mille losanges
Elude
l'astre adoré
Dans
le marais abstrait une pagode élidée
Lui
tire son portrait et tandis qu'insouciantes
Tournent
les montres molles les ondes turbulentes
D’une
valse s'étiolent
Un
bel éphémère bleu sautille au bord des yeux
D'une
souris acoustique atypique et quantique
Et
le bal des chimères chamarrant les mandoles
Indolence
douce-amère se love en alvéoles
La
chrysalide des anges crescendo ravissant
Diffuse
un son étrange bruissement évanescent
Galice
glisse dans les airs esquisse un clair de terre
Sur
ses draps alunit atterrit dans son lit.
Fleur
-1-
Le
cul sur le sol brûlant du bagne de Saint-Laurent-du-Maroni, il a
façonné à coup de caillasse la cuillère à soupe dérobée au
réfectoire, où les bagnards en rang serrés se concentrent sur leur
assiette de fer blanc pour ne pas voir la crasse dont les mouches
s’enivrent et les lettres gravées dans le bois de la table à la
cuillère, ou peut-être aussi gravées à l’ongle par un enragé
devenu fou bien avant la cellule d’isolement, et au-delà de la
crasse et des lettres gravées dans le bois de la table, le dos des
bagnards de la rangée de devant – ici on ne mange pas face à
face, mais tous tournés vers le mur du fond, sur lequel les lampes à
pétrole ont laissé des traces de fumée noire torturées comme la
chevelure du Diable.
A
coup de caillasse, à chaque seconde d’inattention des gardiens,
mais sans précipitation, maîtrisant son impatience, il a aplati le
bombé de la cuillère à soupe. Quand il l’a trouvé assez plate,
elle n’était pas encore prête, sa petite chérie travaillée le
cul sur le sol brûlant du bagne. Il la voulait affûtée et une fois
affûtée il l’a voulue aiguisée, et par la seule volonté de
sortir de l’Enfer, il a métamorphosé la cuillère à soupe
dérobée au réfectoire en un sacré poignard de bagnard. Avec
patience, la tête rasée brandie au soleil de Guyane, parfois
dodelinante de fatigue à la façon d’une tête de coquelicot au
bout de sa tige poilue lorsque la chaleur est trop forte, parfois
immobile comme butée sur un seul rêve – et quel rêve.
Cacher
la cuillère à entremets devenue couteau sous son aisselle gauche,
entre les côtes et le biceps, avant de se plaindre au gardien d’une
douleur violente. Marcher à petits pas à travers les couloirs
jusqu'à l’hôpital, absolument concentré sur sa petite chérie
qui devenait la chair de sa chair au creux de son aisselle.
Poignarder le médecin de sa cuillère-couteau au moment où il se
pencherait pour l’ausculter. S'évader. Une fois libre, remonter le
Maroni jusque sous les arbres et y mourir de faim ou se faire avaler
par un fauve. Peut-être plutôt y crever du paludisme ou de la
lèpre, exactement de la même manière animale que les autres
bagnards, en finissant couché sur le flanc. Mais en crever en
liberté.
-2-
J'ai
trouvé la contrebasse dans sa robe de bois clair, allongée sur la
tranche aux pieds du piano. Ensorcelante avant même d’avoir fait
entendre le son de sa voix. Je me suis assise en face d'elle,
scandalisée à l'idée qu'elle puisse être plus féminine que moi -
aguicheuse, va ! - mais prenant en douce des leçons de pose.
Comme elle m'ignorait encore dix minutes après mon arrivée
- blonde, va ! - je l'ai saisie par le chignon pour la
redresser sur son unique talon haut.
Elle
a laissé aller lascivement son corps contre le mien - allumeuse, va
! - je voulais la faire vibrer, mais je ne pouvais pas, aussi
démunie qu'un homme face à une femme fatale.
-3-
La gueule entrouverte des pistaches sur leur perle verte qu’elles
tiennent pour un grand trésor, et que les hommes croquent au jardin
après avoir écartelé ces prétentieuses petites femelles. Ils les
arrosent de Whisky. Une échelle rouge se tient droite au
milieu des arbres,
avec cet orgueil qu'ont parfois les objets, parce qu'ils
ont fait le
tour des questions existentielles : ils savent ce à quoi ils sont
destinés.
Alors elle est là, elle sait qui elle est, et cela suffit. Quant à
moi, je m'adosse au mur et me laisse baiser par le soleil.
-
4 -
Si
la chance vous sourit, parmi les autres clients du café où vous
êtes seule, vous trouvez une belle gueule à détailler. Vous
l'observez, vous vous y attardez longuement, avec délice, et chaque
détail vous semble tellement à son exacte place que vous savez que
vous n'auriez pas pu l'inventer : elle frise la perfection. C'est un
cadeau des cieux pour vous récompenser d'avoir subi tellement de
visages insignifiants, et de figures ternes, aussitôt vues aussitôt
oubliées. Alors cette gueule, vous la savourez, vous la caressez des
yeux. Vous l'avalez toute entière et la mâchez. Vous croyez l'avoir
assimilée au point qu'elle vous appartient. Mais soudain elle décide
qu'elle est autonome, qu'elle doit vivre sa vie, elle veut quitter la
scène, et disparaître dans la foule de la rue. Vous avez envie de
la rappeler à l'ordre, de hurler votre indignation : elle vous
appartient. Un instant vous envisagez de la dérober à son
propriétaire, d'un coup de canif éclair. Vous entrevoyez des
étagères remplies de belles gueules volées à l'arrachée à la
sortie d'un café. Vous vous abstenez, vous espérez seulement que sa
sortie sera aussi théâtrale que vous l'auriez imaginée : le plus
déchirant, c'est qu'elle s'arrache à vous sans panache.
Marie
Venir
d’ailleurs et mourir à Vichy
Quelle
drôle de folie presque irréfléchie !
A
moins que les bulles de l’eau de Vichy
Fusent
et suscitent des pouvoirs enrichis
Ou
que les pastilles fraîchement blanchies
Garantissent
une haleine bigrement rafraîchie !
A
Vichy, on se nippe avec chichi
L’apparence
est finement affranchie
Aucun
homme à canne n’est avachi
L’allure
est superbement réfléchie.
Sans
eau thermale, on se sent défraichie !
Restez
à Vichy, est un grand pas franchi !!!
Haïku
Deux
aiguilles s'enlacent
Deux
amoureux se regardent
Minuit
est passé
Premier
jour de l’été 2015.
C’est
la Fête de la musique à Vichy !
Un
concert par la « Société Musicale » est annoncé à 15h
au kiosque du parc des Bourins, situé à côté du « Tahiti
Plage », le long de l’Allier.
Quelques
chaises attendent les promeneurs qui passent par hasard. D’autres,
prennent place par habitude. Les musiciens sont installés. Quelques
retardataires se glissent discrètement entre les pupitres…
A
l’heure dite, les chaises commencent à manquer. Les trombonistes
s’échauffent, d'autres placent les lutins. Tous, ajustent leurs
lunettes sur leurs nez. On n’aperçoit que le haut des cuivres où
se reflète le soleil.
Soudain,
l'orchestre se lève et salue l’assemblée. Les musiciens arborent
fièrement leurs gilets couleur bordeaux, imprimés de joueurs de
jazz, gris et or. Leur cou est orné d’un nœud papillon bariolé
sur une chemise blanche.
Au
premier son des trompettistes, les bavardages cessent. A l’écart,
un vieux monsieur assis sur son tabouret pliant, a les yeux
pétillants. Près du kiosque, un garçon se hisse sur la rambarde,
captivé par la grosse caisse. Les notes glissent sur la contrebasse,
sautent sur le saxophone, rebondissent sur le trombone, s’étalent
sur le tambour, s’écrasent sur les cymbales. Le thème du film
« Le jour le plus long » s’achève, le public emporté
par la musique, applaudit à tout rompre.
Ici
et là, on se lève, les plus enthousiastes applaudissent sans
relâche la fanfare. Les musiciens eux aussi sont debout. La joie se
lit sur leurs visages. Dimanche prochain, ils joueront à Riom, sur
la place du marché.
Le
concert à peine fini, la foule se dirige vers le palais des congrès
où va se produire « l’Orchestre d’harmonie de la ville de
vichy ». Il suffit de suivre le mouvement, c'est un des
plaisirs de cette fête populaire, se laisser porter par le flot
humain, sans vraiment savoir où l'on va, ce que l'on va entendre.
Même si l'on a son programme dans les mains.
Les
musiciens de l'harmonie sont vêtus eux de noir ébène, d’une
chemise blanche fermée par un nœud papillon très sobre.
Ce
ne sont pas les mêmes gens qui ont pris place au premier rang. Ils
sont plus âgés, plus traditionnels, plus habitués à des concerts
classiques. Pour autant, d’autres se pressent pour prendre une
place restante.
Les
musiciens accordent leurs instruments. Le chef d’orchestre annonce
le titre de la partition. Il lève sa baguette, le morceau commence,
les cuivres se déchainent. Le silence écoute la musique.
Un
portable à peine audible est vite stoppé. Des enfants assis en
tailleur tapotent en mesure sur leurs genoux.
Au
fil des rues, la musique change de ton. Les passages, eux aussi,
sont habités par des guitaristes, des chanteurs qui envahissent
l’univers des piétons. La ville se transforme en l’espace de
quelques heures. On la regarde différemment. On la voit ! Comme
si la musique en plein air nous invitait à la redécouvrir, à la
voir soudain autrement.
A
côté du Café Corse, passage de l’Amirauté, des africains
jouent. Leurs doigts frappent la peau du djembé. Sur un même tempo,
des européens en concert répondent. Le rythme se répète
inlassablement pendant qu'ici et là des corps s’animent,
galvanisés, enthousiasmés !
L’homme
pressé, la femme à la poussette, les ados en rollers s’arrêtent,
fredonnent sans pour autant oser « s’afficher » alors
que la puissance de la musique les invite, les incite à se laisser
aller, à danser comme s'ils étaient seuls au monde, sans regards
désapprobateurs...Pas si facile de danser seul ou à deux, à 17
heures en pleine ville sous le regard des autres...Et pourtant, si
seulement ils osaient. Alors ils tapent du pied, claquent des doigts,
dandinent des fesses… ils danseront, peut-être plus tard, quand la
lumière du jour se sera effacée.
Dans
le parc des Sources la « Brasserie le Royal » est
assaillie comme les autres cafés par des flâneurs. Attablés, ils
se désaltèrent avec une bière bien fraîche, une limonade, un thé
glacé. Ils s’attarderont encore un peu, mais pas trop car un autre
groupe les attend…
Les
musiciens font le spectacle, les enfants dansent, les jambes
gigotent, les visages se détendent, les sourires foisonnent. Les
amoureux s’embrassent, les amants se touchent, les vieux se
tiennent par la main.
C’est
une journée pas comme les autres. Le temps s’est arrêté et c’est
bon !
Valérie
Un
an
Tant
d’événements
en
seulement un an
c'est
en le traversant
que
l'on pense à ces gens
ces
jeune filles chrétiennes
qui
nous font tant de peine
pourquoi
Boko Haram
ne
baisse-t-il pas les armes
les
proches demandent pourquoi
pour
ceux du Malaysia
tout
à coup envolés
ou
sont-ils bien passés ?
ces
martyrs de Daesh
qui
tel un tissu rêche
les
arrache et les tue
ces
otages disparus
Charlie
est abattu
adieu
charb et cabu
unis
le 11 janvier
pour
tous manifester
ce
cher Robin Williams
l'acteur
avait une âme
cher
maître inattendu
des
poètes disparus
l'avion
décollera
mais
n’atterrira pas
pilote
désespéré
préférant
s'écraser
ceux
qui sortent du lot
pour
que le monde soit beau
bravo
à Malala
Modiano
en sera
cette
littérature
rend
ce monde plus pur
même
si tant de nigauds
parleront
toujours trop
je
pense à ces médias
et
à tous leurs faux pas
ciel
l'affaire Nabilla
bien
sur qu'elle paraîtra
Mais
notre Rosetta
qui
à coup de grands pas
a
permis de lancer
notre
amie Philae
et
l'éclipse solaire
qui
le temps d'un éclair
nous
a tous détourné
de
cette bien triste année
Nouveaux
mots :
Comme
le beaujolais, ils sont arrivés les nouveaux mots que l'on trouvera
dans notre prochain dictionnaire . Cette année, on dédiabolise,
on mémérise,
on glamourise,
on
psychologise !
Savez vous que tout nous est permis ? On peut se saper
comme un baltringue,
se chausser de stilettos
pour aller déjeuner avec un zadiste ;
le menu se composera d'un cari,
d'un burger,
d'un yuzu,
d'un café
gourmand
et enfin de quelques gogis.
Pour
rejoindre notre ami, le covoiturage
bien sur ! Pourvu que l'on ne tombe pas sur un boloss
comme
la dernière fois, nous avions pris
cher, il
nous avait véhiculé en gyropode.
C'est vrai que les
particules fines
sont devenues notre combat premier mais tout de même ! Mince
aujourd'hui, c'est la circulation
alternée,
énervés nous fumons notre e-cigarette.
Ouf notre chauffeur est un hipster
qui va taffer,
tout sauf un
troll.
Nous
avons pris contact avec lui à travers les open-data
de ce site internet et avons payé en bitcoin,
pratique.
Il nous raconte qu'il a été un faucheur
volontaire
mais qu'il s'est pris un scud
alors il s'est calmé.
Nous
sommes arrivés et rejoignons notre
zadiste
qui de surcroît est un adepte du véganisme,
manquait plus que ça ! Son job consiste à créer des captchas
et des gifs ;
le reste du temps il est bénévole dans une recyclerie.
Pendant le déjeuner, nous parlons périurbanisation,
tourisme spatial, marée verte.
Nous ne comprenons rien à ses explications sur l'empreinte
carbone .
Il nous bassine le temps du dessert sur la
crise de liquidité
et enfin nous avoue être un climato-sceptique.
Cela ne nous surprend guère.
Nous
commençons à ressentir une électrosensibilité
désagréable, nous prenons notre ordinateur et rentrons notre
identifiant
pour vérifier si le restaurant n'est pas fibré.
Pas de cyber-attaque,
c'est
déjà ça !
Nous quittons notre ami en faisant un petit selfie
que
nous lui enverrons. Hop, direction la zumba.
Dans le taxi nous regardons sur l'écran un tuto
expliquant comment nettoyer le cuir et ça nous fait
triper .
Nous nous détendons pour enfin nous ressentir de la zénitude.
Une
année d'écriture
Chère
année d'écriture, ce soir je me souviens.
Ces
petits personnages que j'ai posés de ma plume, comme sortis de nulle
part. Au fur et à mesure des sujets demandés, je les ai mis en
scène.
Parfois
je pense à eux, cette femme en route pour la Bretagne, ce garçonnet
tuant son grand-père, cet homme à New-York un 11 septembre. Il y a
aussi ce vieillard glacé, ce fauteuil de psy, cette feuille mourant
lentement, ce paquebot portant mes morts, ce paysan malade. Que de
méli-mêle mots dans mon cerveau pour les raconter. Quel plaisir
ai-je pris à les avoir crées. Et vos histoires à vous qui m'ont
aussi marqué, c'était vraiment bien de les avoir partager. Et ce
vocabulaire et ces expressions si bien expliquées par notre maître
émérite. Tout cela s'est passé et vraiment bien passé.
Mais
surtout ces rencontres, et le temps d'un café nous oubliions nos
montres pour tant se raconter. Mes copines d'écriture, je vous
promet de travailler dur cet été sur mon problème de tirets. Ne
soyez pas trop sages, remplissez vous d'images, afin que nous
puissions toutes, à la rentrée, tourner bien d'autres pages.
Frédéric
Vanitas,
vanitas vanitatis et omnia vanitas
Ecrits
et châtiment.
Dans
cette zone grise
Qu’est
la vie,
Entre
chien et loup,
Qui
dit la vérité ?
Qui
ment ?
Au
jeu du chat et de la souris,
Qui
gagne, qui perd ?
Et
cris et chat qui ment,
Et
couinements de la souris,
Tohu
bohu, charivari, ramdam,
Où
est la vérité ?
Au
fond du puits, comme d’habitude,
Depuis
la lassitude
Dont
elle ne se défait plus.
Dans
son puits il a plu,
Tant
et plus,
Au
début, ça lui a plu.
Et
puis elle s’est lassée,
De
la pluie aussi,
Comme
du reste.
Voilà
dix mille ans
Que
la vérité coule.
Elle
coule à pic,
Au
fond du puits,
Ou
bien elle coule des jours heureux,
Quand
vient l’appui
D’une
bonne nouvelle,
D’un
élan de justice,
Qu’elle
saisit de justesse.
Sinon,
la plupart du temps,
Elle
s’ennuie d’elle-même.
Là-haut,
au grand jour,
Le
chat ment méchamment.
Le
chien aboie dans les bois,
Où
le loup loupe la souris
Verte
qui court dans l’herbe.
Et
les hommes dans tout ça ?
Ils
la cherchent la vérité ?
La
lanterne de Diogène
Ne
serait pas de trop
Dans
le puits sans fond
De
la vérité sans fard.
Du
fond de son puits,
Elle
a creusé profond,
Jusqu’au
centre de la terre.
Elle
a eu chaud, la vérité,
Mais
moins qu’en surface.
Finalement,
à force de creuser,
Comme
un chat perçant,
Elle
est arrivée de l’autre côté de la terre.
Là
où on mange les chiens,
Là
où l’homme est un loup pour l’homme,
Là
où les souris
Commandent
aux ordinateurs.
Elle
a pointé son museau de vérité
A
la margelle du puits.
On
a voulu l’enfermer immédiatement,
Alors
elle a replongé dans son puits
D’ennui,
de nuit, dénué d’huis.
Depuis,
elle puise la patience
D’attendre
des jours meilleurs.
Lorsque
la terre en aura fini
Avec
les souris, les chats,
Les
chiens, les loups,
Et
surtout les hommes menteurs,
La
vérité se retrouvera
Seule
avec les arbres et les insectes,
Les
fleurs et les oiseaux.
Plus
personne n’aura besoin d’elle,
Mais
elle pourra sortir au grand jour.
Elle
regardera le ciel
Gris
et plombé,
Elle
humera l’air
Epais
et fuligineux,
Puis
elle s’écriera :
« Si
on me l’avait demandé,
J’aurais
dit la vérité »…
L'ODYSSEE
DE L'EAU D'ICI
Plus
tard l'ailleurs meilleur !
Pas
sûrs les délices de l'au-delà,
Lapons
du calice l'eau d'ici.
Gouleyante,
l'eau de là,
Pétillante
à Vichy.
Une
note un peu salée,
Très
bon pour le moral.
Verte
mine, et râle ?
Vertus
minérales !
Vraies
ou fausses, toutes eaux.
Pitié
pour l'humain zoo.
Certes,
vaut pas tripette,
Mais
bien là, saperlipopette !
Pas
facile l'ici bas,
Entre
samba et combat.
Brève
la traversée,
Sourire,
larme versée,
Le
temps de comprendre,
Les
jouets faut les rendre.
Fin
du bruit, grand silence,
Vide
intersidéral ?
Néant
de pierre tombale ?
Viendra
bien assez tôt !
Plutôt
la cour du roi Pétaud !
Jolies
les promesses,
Des
fols de la messe,
Oiseaux
de croix,
Oiseaux
de paradis.
Joli
petit paradis,
Avec
qui ?
Les
vieux d'antan ?
Pas
très tentant.
Numéros
du même cabaret,
Voit
pas l'intérêt.
Mauvaise
agence de voyage,
Imprécis
séjour dans les nuages.
Y'a
la télé ? Qu'est-ce qu'on mange ?
Les
copains, que des anges ?
Ou
direction la fournaise ?
Pur
esprit, d'accord,
Plus
d'envies, plus de corps.
Pas
d'appétit sans faim,
Longue
l'éternité, surtout la fin.
Quoi
d'autre sinon, on repique ?
Réincarnative
gymnastique ?
Les
mêmes et on recommence,
Litanie,
triste romance.
Sans
compter, quel hébergeur ?
Un
vieux, un teenager ?
Problèmes
pratiques,
Nécessités
logistiques.
Penser
au plus tôt
A
apprendre l’espéranto !
Trop
vague. Procrastination.
Demain,
demain, la purification !
Hic
et nunc et basta !
Poker
et canasta.
Paris,
bonnes cartes,
Dix
de der ou capot.
Pari
de Descartes ?
Joueur
de pipeau !
Pas
demain, aujourd'hui !
Foin
d'hasardeux sauf-conduit !
Belle
ou pas, d'ici l'eau.
Avec
ou sans cash flow,
Vivre
le possible
L'éphémère
pour cible.
Dans
la tête, le mirobolant,
Les
pensées, tapis volant,
Jusqu'au
bout la flamme,
Carpette
diam'...
LA BELLE EVE Y DANSE
Sur
le pont d’Avignon des possibles
La
belle Eve y danse.
Au
dessus des eaux paisibles,
Elle
guette avec prudence
Les
signes fondateurs
Du
lien unique qu’elle espère.
Se
défiant de l’adulateur
Comme
des promesses de Cythère
Elle
danse calmement, à son rythme,
Tous
yeux pour autrui,
Pesant
ses algorithmes
Mais
pour lui toute ouïe.
Que
ressort-il de ses sens en éveil ?
Des
sentiments troubles et troublés.
Des
monts et merveilles ?
Une
envie de rassembler
Les
pièces d’un puzzle complexe
En
vue de démêler l’écheveau
Des
fils enchevêtrés de son cortex
Face
au possible renouveau.
La
belle danseuse y parvient-elle ?
C’est
difficile et parti pour être long.
Pourtant
à cette rude tâche elle s’attelle
Posant
de-ci de-là des jalons.
Sa
quête connaîtra t-elle une bonne fin ?
Comme
dans toute recherche à deux,
Encore
faut-il que l’autre séraphin
Ne
soit pas trop hasardeux.
Serait-il
si mauvais danseur ?
Bon
maître de ballet, mais ici
Point
n’est besoin d’un jacasseur
C’est
l’homme fiable qu’on apprécie.
Alors
sur le pont d’Avignon des possibles
Emplie
d’espoir, la belle Eve y danse
A
tous les charmes sensible
Mais
forte de son indépendance,
Elle
soupèse son vis-à-vis
Curieuse
mais circonspecte
Espérant
l’amour d’une vie
Entre
intellect et affect.
Bon,
mais cette danse finira t-elle ?
Les
danseurs enlacés aboutiront-ils ?
Celui
du temps est leur seul autel
Sur
lequel sacrifier aux danses fertiles.
Le Printemps des Poètes: L'Insurrection Poétique
Mars 2015, de l'Atelier d'écriture...L’EMAIL DES MOTS
Le temps s’égrène,
futile, abandon pathétique,
Lors que l’instant fatal
et non hypothétique
S’approche à pas de loup
de nos êtres fragiles
Qui pour l’heure encore
louent leurs enveloppes d’argile
Celles où Dieu insuffla,
dit-on, jadis la vie
Laquelle s’essouffla,
courant après l’envie,
De trop dire, de trop
faire, de perdre en entropie
Cette énergie de fer qui
sied aux utopies.
Il est temps, sonne
l’heure où les comptes se règlent,
Viens oiseau de malheur
avec tes griffes d’aigle
Arracher de nos vies ses
reliefs d’orgueil,
Eux qui nous ont ravis
seront notre cercueil.
Nos espoirs les plus
fous, nos rêves décousus
Tout ce dont on se fout,
tout ce qui a déçu,
Dans le creuset commun
d’une unique fournaise
Brûlera sans lendemain
en soldant la genèse.
Pouvions-nous éviter que
cette frénésie
Ne nous fasse visiter la
palingénésie ?
Antichambre risquée de
l’apocatastase
Hypothèse critiquée qui
mènerait à l’extase.
A quelque gynécée porté
sur l’odelette !
Les femmes seules
eussent pu, armées de la raison
Chasser le corrompu par
un contrepoison.
L’oiseau doit à la plume
le moyen de s’enfuir
Elle eut pris du volume
pour tenter de séduire
Ceux qui voyaient venir
au loin l’apocalypse
En quête d’un avenir à
l’abri des éclipses.
Toujours il eut fallu
laisser la place au verbe,
Là était le salut que le
beau exacerbe.
Si les poètes seuls
avaient voix au chapitre,
Ce n’est pas un linceul
qui clorait cet épître.
Comme lors des corso où
l’on se bat de fleurs,
Des mots seulement le
sceau marquerait nos valeurs.
Allons appliquons-nous,
faisons encore le cancre
Qui néglige la tache
pour consommer son encre.
Frédéric
La
maîtresse, elle dit que...
La
maîtresse, elle dit que c’est joli la poésie, mais moi, je n’aime pas ça, la poésie !!
C’est triste et ça parle que de choses pour les grandes personnes. Et pis c’est plein de mots compliqués, qu’on ne comprend pas quand on a six ans.
La poésie ça raconte la campagne, avec des paysages plein d’arbres en fleurs ou des chemins courant sous la neige et des animaux qui parlent, ou encore l’histoire de soldats qui sont couchés dans l’herbe, ou de l’eau de la rivière qui brille comme la bague que Papa a donné à Maman pour lui dire qu’il voulait se marier avec elle.
Et pis, il faut l’apprendre par cœur, la poésie, la réciter devant tout les enfants de la classe, il y en a qui rigolent en se cachant derrière leur main. Moi, quand c’est mon tour d’aller au tableau à côté du bureau de la maîtresse, je suis tout rouge.
La maîtresse veut qu’on mette le ton. C’est quoi …le ton ? Des fois, je ne sais pas ce que je dis et puis on fait comment pour « laisser tomber la voix » ?
Le dimanche, quand on va manger chez Pépé et Mémé, c’est toujours au moment du gâteau que Maman me demande de réciter la dernière poésie que j’ai apprise. Il faut que je me lève de table et que j’aille me mettre debout à côté de Pépé pour mâchonner des mots à la queue leuleu qui n’ont souvent ni queue ni tête pour moi. J’ai toujours peur d’en mettre un à la place de l’autre, ou d’en oublier un.
Mais quand j’ai fini, j’ai des frissons dans mon dos quand Mémé m’applaudit avec de la pluie dans les yeux, elle m’embrasse en avalant mes joux et me donne la plus grosse part du gâteau en disant que je suis le plus beau des petits garçons.
Là, j’aime bien la poésie
C’est triste et ça parle que de choses pour les grandes personnes. Et pis c’est plein de mots compliqués, qu’on ne comprend pas quand on a six ans.
La poésie ça raconte la campagne, avec des paysages plein d’arbres en fleurs ou des chemins courant sous la neige et des animaux qui parlent, ou encore l’histoire de soldats qui sont couchés dans l’herbe, ou de l’eau de la rivière qui brille comme la bague que Papa a donné à Maman pour lui dire qu’il voulait se marier avec elle.
Et pis, il faut l’apprendre par cœur, la poésie, la réciter devant tout les enfants de la classe, il y en a qui rigolent en se cachant derrière leur main. Moi, quand c’est mon tour d’aller au tableau à côté du bureau de la maîtresse, je suis tout rouge.
La maîtresse veut qu’on mette le ton. C’est quoi …le ton ? Des fois, je ne sais pas ce que je dis et puis on fait comment pour « laisser tomber la voix » ?
Le dimanche, quand on va manger chez Pépé et Mémé, c’est toujours au moment du gâteau que Maman me demande de réciter la dernière poésie que j’ai apprise. Il faut que je me lève de table et que j’aille me mettre debout à côté de Pépé pour mâchonner des mots à la queue leuleu qui n’ont souvent ni queue ni tête pour moi. J’ai toujours peur d’en mettre un à la place de l’autre, ou d’en oublier un.
Mais quand j’ai fini, j’ai des frissons dans mon dos quand Mémé m’applaudit avec de la pluie dans les yeux, elle m’embrasse en avalant mes joux et me donne la plus grosse part du gâteau en disant que je suis le plus beau des petits garçons.
Là, j’aime bien la poésie
Sylvie S
INSURRECTION
Ce qui
me révolte?
C’est
la pensée coquine
Qui me
dicte ma conduite mesquine
Ce qui
m’indigne?
C’est
la croyance maligne
Que
c’est l’autre qui me porte la guigne
Ce qui
m’insupporte?
Ce sont
les petites phrases anodines
Qui
n’en sont pas moins assassines
Ce que
je conteste?
C’est
que pour avoir une belle angine,
Il
faille absolument une belle poitrine
Ce que
je refuse?
C’est que pour faire une bonne bénédictine
Il
faille un bouquet d’églantine.
Caroline K
Foin des tyrans !
Honni soit les pourvoyeurs de thèmes !
A bas la dictature
De ces chefaillons aux courtes ailes
Jetons-les en pâture
Aux démons pour qu'ils les écartèlent
Biffons-les d'une rature
Ils n'auront ni fleurs ni chrysanthèmes !
Et donnons la liberté aux mots !
Aboyons haut nos phrases
Nées des délires de nos fantaisies
Rejetons les oukases
De ces ayatollahs de la poésie
Devenons kamikazes
Clouons au pilori ces grimauds !
Absurdité d’un monde
Absurdité d’un monde
et cruauté de l’homme
Quand partout dans le
monde
Des milliers de
civils tombent.
Rwanda, Kosovo, Congo
Absurdité d’un mot
que liberté on nomme
Quand des hommes sont
sacrifiés
Sous les bombes.
Mali, Soudan, Ethiopie,
Peuples décimés pour
l’histoire
Affamés parc’que nous
refusons de voir
L’ignominie de
l’homme
Dans cette immense
foire.
Virus, sècheresses et
famines
Qu’on sait repousser
loin de nous,
Font fuir les hommes
en cohortes.
Et quand dans notre
confort
Nous sommes résignés
Soudain les loups
sont à nos portes.
Les miliciens de nos
consciences
Enfin, nous
rassemblent quand
Les attentats
perpétrés
Par des kamikazes enragés
Rendent fébriles nos
continents surveillés-surarmés.
Alors, nos dirigeants
alignés
Pour une belle image
à la télé
Nous leurrent.
Mais je vis pour mon bonheur
Engagés dans un
inlassable labeur
Contre la cruauté des
leurs.
Sylvie M
En ces temps suspendus...
En
ces temps suspendus je lavais les vitraux
Du
choeur des cathédrales
Eclaboussant
le ciel de filigranes dorés
Auréolant
l'abîme des toiles du Grand Maitre
Qui
naissent des couleurs une fois évaporées
Les
blanches sépultures se chauffaient au soleil
Leurs
larmes d'ambre coulant vers l'espoir infini
Et
puis le crépuscule déployait de son aile
Un
voile sombre éphémère dont le souffle mourait
Dans
un dernier soupir
Le
noir sied aux âmes seules qui embarquent et s'envolent
Vers
l'alpha l'oméga et la poussière cosmique
De
leurs rêves en spirale flotte comme suspendue
A
l’appel du cristal
Car l'ivresse est ailleurs moi je préfère le vin d'ici
Aux promesses de l'eau delà dans les vers de la poésie
Je plonge mes lèvres jamais las
Mais quand des sarcophages montaient les paraboles
Les
gisants ravissants avaient une classe folle.
Dominique V
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