A partir de 3 ans
Si on parlait de la mort, du Dr Catherine Dolto et Colline Faure-Poirée.
Des pages les plus colorées possible pour explorer le deuil. La pédiatre Catherine Dolto y explique que cacher la mort d’un proche à un enfant, au lieu de le protéger, peut faire plus de mal que de bien. Elle donne des mots pour parler aux tout petits, définir la mort, ce «grand mystère», et ce que c’est que vivre, grandir et mûrir. Sur les illustrations, l’enfant est toujours accompagné, notamment lorsqu’il plante une fleur qui germe, pousse et meurt aussi. Car le livre ouvre sur ces étapes qui consolent et aident à faire son deuil : être entouré, parler du disparu, garder son souvenir vivant… Et penser à la vie qui continue. L.E.

Juste un petit bout ! d’Emile Jadoul
C’était pas gagné. Grâce à sa longue écharpe violette, la poule Léa résiste au froid et à la neige. Frigorifiés, un petit oiseau et un petit lapin lui demandent refuge. Rien de plus facile pour ces animaux doux et inoffensifs que de se serrer les coudes et le reste. Sauf que se pointe un petit renard qui voudrait bien se lover lui aussi dans cette chaleur amicale. Les justifications pour ne pas accueillir le carnivore fusent : «Echarpe trop courte», «peux pas bouger», «bout d’écharpe vraiment trop petit». C’est absurde mais ça fait tilt : difficile de faire de la place à celui qu’on craint pour des raisons historiques ou génétiques. Léa finit par ouvrir ses ailes au goupil. Pas besoin de beaucoup plus pour expliquer la différence et les a priori aux tout-petits. L.B.
Pilotin de Léo Lionni
Il s’appelle Pilotin. Un petit poisson noir parmi ses milliers de frères et sœurs rouge vermillon. Ils vivent tranquille dans la mer. Mais un jour, la tuile. Un gros poisson féroce les dévore tous… Seul Pilotin en réchappe. Il s’enfonce dans les profondeurs de la mer, triste et seul. Il croise mille merveilles, comme «une méduse belle comme une gelée d’arc-en-ciel». Au détour d’un rocher, il tombe sur des cousins rouges comme ses frères. Il les invite à poursuivre la découverte du monde. Mais aucun n’ose. «Le grand poisson nous mangerait !» Pilotin est très embêté, il sait combien on est plus fort ensemble malgré nos différences. Il réfléchit… «Et soudain, il s’écria : J’ai trouvé !» On vous laisse la surprise. M.P.
A partir de 5 ans
Les questions des tout-petits sur les méchants de Marie Aubinais
Parce que la justice, l’égalité ou le respect sont des valeurs universelles, des contes venus du monde entier (Burkina Faso, Italie, Scandinavie ou des Indiens Cherokee) répondent à ces Questions des tout-petits sur les méchants. Les séquences sont dessinées par deux illustratrices différentes pour séparer la vie d’aujourd’hui, où des petits interrogent leurs parents (et grands-parents) sur des scènes de la vie de tous les jours, et la sagesse d’antan, quand des dragons ou des magiciens apportent leur lot de réponses. Oscillant entre pédagogie et philosophie, l’ouvrage est sorti en janvier. Il parle de la guerre, pas formellement des attentats. Mais puisqu’il y est question à chaque page du sentiment d’injustice et du besoin de justice, de la lutte entre le bien et le mal et de l’importance de l’éducation et du respect de l’autre, il fait plus que l’affaire. L.Br.
Le ciel d’Anna, de Stian Hole
«Aujourd’hui, dit papa, quelqu’un fait tomber du ciel une averse de clous sur nos têtes. ça n’aurait jamais dû se passer comme ça.» Cette pluie de tristesse, c’est la mort de la maman d’Anna. «Mais peut-être que demain, ce sera une pluie de fraises et de miel», murmure Anna à son père. Avec ses yeux bleus et sa tignasse rousse, la petite fille emmène son père loin, dans son monde imaginaire. Peut-être vont-ils revoir «maman» sur leur route. Qui sait. «On n’a qu’à suivre les poissons volants. Ils connaissent sûrement le chemin.» Cet album de Stian Hole déborde de poésie et de sagesse. Il ne fait pas pleurer. «Je n’étais jamais allé dans les endroits que tu viens de me montrer, dit papa. Merci de m’y avoir emmené. Mais comment on va faire pour rentrer à la maison?» Anna a alors cette belle réponse: «On va faire comme le chat qui tombe du neuvième étage, qui se retourne en plein vol et retombe sur ses pattes.» M.P.
Le nuage bleu, de Tomi Ungerer
Rarement on a autant aimé un nuage. Doux comme du coton, rondouillet comme un oreiller, tout bleu comme un ciel sage. Rarement les histoires, même pour enfants, font à ce point flotter dans une béatitude nourrie de poésie, de beaux sentiments (sans gnangnan), de fantaisie aussi. L’histoire est en apparence toute simple: un petit nuage tout bleu vivait heureux avec son amie la lune. Une sorte de bouboule rebelle (et pacifiste) qui ne suit jamais les troupeaux de nuages, refuse obstinément de se laisser pleuvoir et encore plus de foudroyer. Il en est si heureux et si bleu, qu’il bleuit tout sur son passage: les cerfs-volants, les oiseaux, les avions, les sommets des montagnes… Jusqu’au jour où, alerté par un gros nuage de fumée noire, il découvre une ville en feu dans laquelle les blancs tuent les noirs, les noirs les jaunes etc. Alors, pour la première fois de sa vie, le nuage pleut sur le brasier, jusqu’à la dernière goutte. Il s’évapore, laissant derrière lui, un monde de paix, où tout le monde est bleu. Le talent de Tomi Ungerer, tout à la fois auteur illustrateur, mais aussi affichiste, inventeur d’objets etc., est là éclatant. C.Ma.
Capitaine Papy de Benji Davies
Tim est un mignon petit Anglais, proche de son grand-père, qui l’emmène parfois sur une île superbe remplie de perroquets, de cascades et de végétation luxuriante - on se croirait dans Paul et Virginie. On y est si bien, sur cette île merveilleuse, qu’un jour Papy lui annonce, ô surprise, qu’il compte bien y rester. Pour toujours. Et que si Tim doit reprendre la route, il le fera seul. Mais pas d’inquiétude, et pas de tristesse, car Papy sera là. Par la pensée… Alors Tim fera le voyage en sens inverse, bravant la tempête et affrontant la solitude. On s’attarde sur la mine bonhomme de Capitaine Papy, le regard si touchant et interrogateur de Tim, sur la multitude de détails et de couleurs de cet album. Il évoque le deuil, l’absence et le manque par touches délicates et efficaces, si bien que subsiste, une fois la lecture achevée, une songeuse mélancolie. J.L.
Flon-Flon et musette, de Elzbieta
C’est un album essentiel depuis vingt ans pour parler de la guerre aux enfants. Flon-Flon et Musette, deux petits lapins, passent leurs temps à jouer ensemble. Mais, un jour, le papa du premier lit dans le journal que la guerre est arrivée. Le récit, qui évoque par sa date de publication, 1993, les événements en ex-Yougoslavie est un mélange de Roméo et Juliette et de la Peste, de Camus. Malgré les affrontements, Flon-Flon veut toujours jouer avec son amie, mais sa mère lui dit que ce n’est pas possible. A la place du ruisseau qui les séparait, une haie d’épines se dresse désormais. La guerre finit par s’arrêter. Pourtant, la haie d’épines reste. Le papa dit à Flon-Flon : «La guerre ne meurt jamais mon petit. Elle s’endort seulement de temps en temps. Et quand elle dort, il faut faire très attention à ne pas la réveiller.» Le lapinot décide de braver l’interdit, part dans la neige, retrouve Musette. Ils se saluent en se frottant le nez comme les Inuits, c’est mignon, ça fait du bien. Q.G.
A partir de 7 ans
Sept milliards de visages, de Peter Spier
On a connu cet album dans les années 80 titré Quatre milliards de visages, il en compte aujourd’hui sept mais le message sur ce qu’on appelait pas encore le vivre ensemble reste intact. Ce que raconte et illustre Peter Spier au fil des pages de ce classique, c’est la richesse de la diversité de l’humanité, des couleurs de peau (avec un nuancier beaucoup plus varié que blanc/noir) mais aussi des formes de nez, de lobes d’oreilles, des yeux des cheveux… Diversité physique mais aussi culturelle: langues, religions, habitudes alimentaires… Le tout illustré de façon élégante et riche avec une grande variété d’exemples qui permettent de décentrer notre regard européen, sans classer, ni hiérarchiser. L’album se conclut par deux belles doubles pages très évocatrices, à l’heure ou la tendance est au repli sur notre «mode de vie». «Imaginez comme le monde serait triste si tout le monde ressemblait à tout le monde, si chacun pensait, mangeait, s’habillait et agissait de la même façon, conclut Peter Spier? N’est ce pas merveilleux un monde ou personne ne ressemble à personne ?» G.La.
Cité Babel, de Pascale Hédelin et Gaëlle Duhazé
C’est un livre étroit et haut, comme cet immeuble dont il raconte la vie quotidienne des habitants, de religions, cultures et traditions différentes. Au premier étage vit une famille catholique qui fête Noël et Pâques, les baptêmes et les premières communions. Au deuxième, la famille juive célèbre Pessah et Pourim, et ne travaille jamais le samedi. Au troisième, les musulmans mangent du mouton pour l’Aïd al-Kebir et écoutent tonton Habib raconter son pèlerinage à La Mecque. Quant à l’épicier du rez-de-chaussée, il est athée mais sait répondre aux besoins de chacun, bouddhistes comme hindouistes, sans oublier la déco pour les fêtes laïques comme Carnaval ou Halloween ! Avec ses pages à tourner à chaque étage, ses histoires au fil des saisons et ses dessins chaleureux et détaillés, Cité Babel est un bijou de pédagogie pour comprendre les religions monothéistes et leur pratique. Comme quoi, il est si facile de vivre ensemble. C.Gé.
Akim court, de Claude K. Dubois
Cet album raconte l’histoire d’un petit garçon touché par la guerre. Il joue gentiment quand soudain des bombes se déversent sur son village. Il est séparé de ses parents, voient des corps jonchés le sol des rues. Le dessin, au joli fusain noir, n’esthétise rien mais ne cache pas non plus. Akim est capturé par des soldats, il doit leur rendre des services, aller leur chercher de l’eau contre un bol de riz. Un jour, profitant d’un moment d’inattention, il s’enfuit. Il croise d’autres réfugiés, ils marchent longtemps tous ensemble. L’histoire se termine bien, il retrouve sa mère, saute dans ses bras. Ce récit, difficile, triste, à lire avec un adulte est tout de même utile pour expliquer le drame des migrants, que c’est normal parfois de s’enfuir, que la vie (ou ce qu’il en reste) doit continuer, et qu’il y a, bien sûr, toujours de l’espoir. Q.G.
A partir de 11 ans
Vivons ensemble : Pour répondre aux questions des enfants sur l’immigration de Mustapha Harzoune et Samia Messaoudi
C’est une sorte de dico. Qu’on peut ouvrir à n’importe laquelle des 250 pages. Refermer. Et feuilleter plus tard. Un couteau suisse pour apprendre à vivre ensemble, en somme. Chaque double page répond à une question. Peut-on ne pas avoir de nationalité ? Qu’est-ce qu’un réfugié ? Y a-t-il toujours eu des frontières ? C’est quoi le vivre ensemble ? Au fait, être Français, ça veut dire quoi ? Et d’autres, démontant de manière simple des raccourcis répandus : tous les musulmans sont-ils islamistes ? Que dit le Coran à propos du voile ? Ce bouquin est aussi truffé de ressources (films, extraits de chansons…). D’où on a pioché : «Ton Christ est juif, ta voiture est japonaise, ton couscous est algérien, ta démocratie est grecque, ton café est brésilien… Et tu reproches à ton voisin d’être un étranger ?» (Anonyme, chanté par le poète belge Julos Beaucarne). M.P.
Pourquoi les hommes font-ils la guerre ? de Myriam Revault d’Allonnes
Pourquoi les hommes se disputent-ils à propos de Dieu ? de Michaël Foessel
Pourquoi les hommes font-ils la guerre ? Pourquoi se disputent-ils à propos de Dieu ? Voilà de sacrées colles… Et deux petits précis précieux adressés aux ados et à leurs parents. Les philosophes Michaël Foessel et Myriam Revault d’Allonnes décortiquent quelques notions universelles que les quinze derniers jours ont rendues cruellement actuelles. Pas pour y plaquer des réponses toutes faites mais pour livrer des clés. Répondre aux angoisses en posant les choses à plat. Eviter les clichés et les raccourcis. En la matière, mieux vaut se méfier des discours pétris de simplicité. On y trouve ce paradoxe à méditer : «La guerre est liée à la civilisation : la civilisation ne signifie pas que la barbarie disparaît. […] On invente presque au même moment l’imprimerie et la poudre à canon.» L.E.
Il était plusieurs «foi», de Monique Gilbert.
«Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères, sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots», disait Martin Luther King. Mais pour se comprendre et se respecter, il faut d’abord apprendre à se connaître. C’est le but de ce livre, qui répond de façon simple, vivante et sans parti pris aux questions que les collégiens -voire les adultes- se posent sur les quatre religions les plus représentées en France. En décrivant la journée, la semaine, l’année et la vie d’enfants pratiquant le judaïsme, le catholicisme, l’islam et le protestantisme, il permet surtout de se rendre compte à quel point leurs croyances et rites religieux se ressemblent. Pour tous, Dieu est unique. Pour tous, à l’origine, il y a la Bible. Pour tous, il y a six jours de travail et un jour de prière. Tous croient à la résurrection. Publié pour la première fois en 1977, l’ouvrage a été entièrement remanié et complété. Jusqu’à cette édition poche, parue en septembre. Plus que jamais nécessaire, il peut aussi servir d’outil en classe. C.Sc.
A partir de 13 ans
Maintenant, c’est ma vie de Meg Rosoff
Dans un futur très proche, Daisy qui vit à New York avec son père et sa marâtre se retrouve expédiée dans la campagne londonienne. Sa tante Penn et ses quatre cousins habitent une ferme biscornue où elle découvre un peu de chaleur humaine et tombe amoureuse d’Edmond. Mais à peine la gentille tante partie en voyage, une bombe explose dans une gare. Les attentats se multiplient et une guerre mondiale éclate. Un Ennemi a envahi la Grande-Bretagne de l’intérieur pendant que ses soldats se battent au loin. La ferme réquisitionnée, les enfants sont placés dans un centre de réfugiés. Daisy et sa cousine préférée Piper finissent par errer sur les routes à la recherche du reste de la famille. Maintenant c’est ma vie, écrit en 2004 dans la foulée de la guerre en Irak, réédité en 2014, est un roman poignant, qui parle de la brutalité de la guerre et de la rupture avec la vie d’avant, mais surtout de comment des événements dramatiques font rapidement grandir. F.Rl.
A partir de 14 ans
Douze heures avant de Gabriella Ambroisio
Dima, Palestinienne, a grandi dans un camp de réfugiés. Myriam, Israélienne, a émigré de Californie. Toutes deux ont 18 ans et vivent dans la même violence quotidienne : attentats, alertes, ruines, morts. Les destins de Dima (qui va se porter volontaire pour une mission suicide) et de Myriam (dont le petit ami a été tué lors d’un attentat) vont se croiser dans la pire des circonstances. Rédigé sous la forme d’un compte à rebours, ce roman est «librement inspiré» de faits réels : Ayat al-Akhras, Palestinienne de 17 ans, s’est fait exploser dans un supermarché de Jérusalem le 29 mars 2002. Le livre fictionne (à peine) ses dernières heures et celles de ses victimes. Douze heures pendant lesquelles Juifs et Arabes traversent le roman, permettant à l’auteur d’expliquer le conflit israélo-palestinien et le mécanisme du terrorisme. Pour Amnesty, ce livre «ne blâme pas et ne juge pas… Il est simplement honnête. Et c’est là que réside sa magie.» A.Va.
Frédérique Roussel , Guillaume Launay , Catherine Mallaval , Laure Equy , Camille Gévaudan , Marie Piquemal , Quentin Girard , Coralie Schaub , Laure Bretton , Johanna Luyssen , Audrey Vacher Si on parlait de la mort du Dr. Catherine Dolto et Colline Faure-Poirée. Dessin : Frédérick Mansot. Gallimard Jeunesse, «Mine de rien», 6 €.
Juste un petit bout ! d’Emile Jadoul, l’Ecole des Loisirs, coll. Pastel, 11,20 €.
Pilotin de Léo Lionni, l’Ecole des loisirs, 11,70 €.
Les questions des tout-petits sur  les  méchants de Marie Aubinais, Bayard Jeunesse, 14,90 €.
Le ciel d’Anna, de Stian Hole. Albin Michel Jeunesse. 12,50 €.
Le nuage bleu, de Tomi Ungerer, L’Ecole des loisirs, 13,20 €.
Capitaine Papy de Benji Davies, éd. Milan, 11,90 €.
Flon-Flon et Musette de Elzbieta, l’Ecole des Loisirs, coll. Pastel, 10,50 €.
Sept milliards de visages, texte et illustrations de Peter Spier, texte français de Christian Poslaniec, l’Ecole des Loisirs. 15,30 € au format album, 5,60 en version poche.
Cité Babel de Pascale Hédelin et Gaëlle Duhazé, les Editions des éléphants, 16,50 €.
Akim court, de Claude K. Dubois, Pastel, 11,5 €.
Vivons ensemble : pour répondre aux questions des enfants sur l’immigration de Mustapha Harzoune et Samia Messaoudi, Albin Michel Jeunesse, 19,90 €.
Pourquoi les hommes font-ils la guerre ? de Myriam Revault d’Allonnes. Dessins : Jochen Gerner. Gallimard, 9,50 €.
Pourquoi les hommes se disputent-ils à propos de Dieu ? de Michaël Foessel. Dessins : Aurore Callias. Gallimard, 10 €.
Il était plusieurs «foi», de Monique Gilbert. Albin Michel Jeunesse, 9,50 €.
Maintenant, c’est ma vie de Meg Rosoff, Albin Michel, «Wiz», 12,20 €.
Douze heures avant de Gabriella Ambroisio, Gallimard, «Scripto», 8,15 €.