Payer un livre seulement si la lecture nous satisfait. C’est l’idée suggérée par Paulo Coelho, en début de semaine. L’auteur brésilien aux millions de livres vendus a mis en ligne deux de ses romans disponibles gratuitement sur son site Internet. Mais pour aller plus loin que cette initiative, que peut-on lire gratuitement sur Internet ?
Manual of the Warrior of Light est désormais disponible en anglais tout comme la version portugaise de Brida. L’objectif de la démarche est de prouver à l’industrie du livre «qu’Internet n’est pas un danger pour le secteur», selon l’auteur. Ce n’est pas la première fois qu’il prend le contre-pied du modèle de vente classique. En 2012, Paulo Coelho s’épanchait déjà sur sa volonté de permettre aux gens de télécharger illégalement ses œuvres. Il incitait même les pirates à les publier sur Internet. Certains s’étaient amusé de la facilité pour le Brésilien de vanter les bienfaits du piratage alors que ses livres se vendent par centaine de milliers. Reste que l’auteur de l’Alchimiste est l'un des seuls auteurs à succès à proposer gratuitement des livres sur internet. Mais de nombreux moyens existent pour accéder à des œuvres littéraires numérisées de manière gratuite sans contrevenir au droit sur la propriété intellectuelle.

Les ouvrages tombés dans le domaine public

Sur le net, nombreux sont les services à proposer la consultation ou le téléchargement gratuit de livres numériques. A l’image de Lire en ligne ou d’In Libro Veritas, les sites offrant un accès gratuit à des livres numériques pullulent. Mais on n’y trouve pas tout ! Et heureusement pour les petites librairies, seuls certains bouquins sont disponibles sur ces sites. Il faut en effet que les ouvrages soient tombés dans le domaine public. Cela nécessite d’attendre au moins soixante-dix ans après la mort de l’auteur (hors prorogations de guerre, comme pour Saint-Exupéry dont les droits sont encore protégés), pour avoir la chance de découvrir ou redécouvrir des ouvrages gratis. Vous trouverez aussi bien Madame Bovary de Gustave Flaubert, que L’origine de la tragédie de Friedrich Nietzsche. Mais rien de Guillaume Musso. Un mal pour un bien ? 

La licence Creative Commons

Ces mêmes sites proposent aussi des livres numériques d’auteurs indépendants ayant décidé de partager leur publications sous la licence Creative Commons. Sous le terme barbare de «Creative Commons BY-NC-ND», cette licence permet la circulation, l’échange et l’utilisation légale d’une oeuvre. L’auteur partage librement et gratuitement son livre tout en ayant quelques garanties. Le lecteur a ainsi le droit de partager l’ouvrage, tout en ayant l’obligation de citer son auteur. Il s’engage aussi à ne pas le modifier. Cette méthode permet à un grand nombre d’auteurs qui n’ont pas la chance d’être édité par une maison d’édition de faire profiter les lecteurs de leur production et de la publier sans risque de perdre le droit moral qu’ils ont sur leur oeuvre. A noter aussi que la maison d'éditions Zones publie ses livres à la fois sur papier et sur le modèle du «lyber théorisé». Il s'agit ici d'une démarche politique de partage du savoir, qui ne doit surtout pas empêcher les lecteurs d'acquérir, aussi, des livres. 

Les bibliothèques numériques

D’autres ressources existent. La plus connue d’entre elles appartient au géant américain Google. L’arrivée tonitruante de Google Books en 2004 avait bousculé tout le marché, notamment en France. La firme de la Silicon Valley numérisait des dizaines de milliers d’ouvrages et d’articles scientifiques avec des moyens considérables sans toujours demander l’autorisation des auteurs et éditeurs. Aujourd’hui, le service regroupe une manne considérable d’oeuvres numérisées accessibles à la fois de manière payante et gratuite, en fonction des droits d’auteurs négociés.
Face à la montée en puissance des ventes de livres numériques, à l’élargissement de l’offre numérique éditoriale, au changement des pratiques ainsi qu’au développement de l’équipement des particuliers en tablettes et liseuses, le système s’est adapté. Si les librairies ont pris le train du numérique en marche, les bibliothèques participent aussi au processus de numérisation. Dès 1997, la Bibliothèque nationale de France (BNF), a lancé Gallica, une vaste bibliothèque dématérialisée, qui compte aujourd’hui plus de deux millions de documents, accessibles en ligne. Outre des manuscrits et des documents anciens remontants jusqu’au XVe siècle, Gallica permet ainsi la consultation de nombreuses collections libres.
L’établissement public favorise aussi l’accès à des ouvrages dont les droits ont été négociés avec les ayants droit, mais la plupart d’entre eux, payants, renvoie vers des sites de ventes en ligne. La BNF numérise aussi, depuis 2012, des œuvres du XXe siècle ne faisant plus l’objet d’une commercialisation par un éditeur, une décision qui avait provoqué l’ire d’un collectif d’auteur lors du vote de la loi par le Parlement. En 2011, le président de la BNF, Bruno Racine, visait déjà «l’exhaustivité pour le patrimoine imprimé français». Un accès au patrimoine qui passe aussi par les bibliothèques municipales, à l’image de Numélyo, la bibliothèque numérique de Lyon, regroupant près de 8 000 livres anciens.